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Tornade s’en est allé

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Tornade s’en est allé

« Mieux vaut un petit rôle dans un très bon film que l’inverse.»

Certains grands seconds rôles sont passés à la postérité tels Carette et Dalio dont les carrières ont été flamboyantes. Dans le même registre on pourra penser à de Funès, obscur pianiste de bar, repéré par Robert Dhéry, qui débuta sa carrière par des apparitions et devint la star que l’on connaît, Michel Galabru son compère et Jean Rochefort qui, de faire valoir de Belmondo est passé au rang de vedettariat. On pourra alors aussi dans un autre registre, y joindre le regretté Michel Duchaussoy.

D’autres ont marqué le cinéma français, sans que parfois on se souvienne de leurs noms, mais leurs visages restent gravés sur la pellicule et dans nos mémoires.

Gaston Modot, l’inoubliable officier du cadastre dans la Grande Illusion et Schumacher, le garde chasse en passe d’être cocu dans La Règle du jeu, c’est lui ! Il a débuté au début du siècle dans le cinéma muet pour continuer sa carrière dans le parlant. Plus de 400 apparitions à l’écran avec sa participation dans La Bandera de Julien Duvivier, Lucrèce Borgia d’Abel Gance, La Marseillaise et French Cancan de Jean Renoir, (1954), Pépé le Moko de Julien Duvivier, Casque d’or de Jacques Becker ou encore Les Enfants du paradis de Marcel Carné. On le voit encore dans Les Amants de Louis Malle en 1958. Il jouera toute sa vie et sa dernière apparition date de 1966 à la Télévision. Dans La Grande Illusion il était en compagnie de Sylvain Itkine, interprète de Demolder, passionné de poésie surnommé Pindare. Il mourra malheureusement en 1944 sous la torture de la Gestapo.

Plus proche de nous il faudrait citer Dominique Zardi, disparu il y a deux ans, qui apparut avec son physique de chauve teigneux dans plus de 500 films dont de nombreux avec Claude Chabrol, Jean-Pierre Mocky et Pierre Granier-Deferre.

On ne saurait dans cette gamme ignorer le grand Philippe Castelli, grand dégingandé à la gouaille traînante, à l’allure d’aristo décati, interprète de tous les loufiats, tenanciers d’hôtels borgnes, troisième couteaux, vendeurs de fausse monnaie, bistrotiers ronchons, concierges de palace, buralistes aigris et j’en passe… du cinoche français.

Dans cette tradition on trouve encore de nos jours quelques exemples comme Bernard Bloch, l’assassin dans Châteauvallon, qui mène parallèlement une carrière théâtrale de comédien auteur et metteur en scène. Il a participé à plus de 24 films, 32 télévisions et plus de 80 pièces de théâtre. Il est l’auteur de cette merveilleuse devise : « Mieux vaut un petit rôle dans un très bon film que l’inverse.»

On ne répètera jamais assez que les seconds rôles et les silhouettes de caractère sont les clefs de la qualité d’un film. Encore faut-il leur réserver une situation dans le scénario où ils puissent s’exprimer. Il faut parfois en deux secondes avoir l’art d’estampiller un personnage anodin et lui donner un caractère spécial et pittoresque.

Le cinéma comme le théâtre actuel souffre du fait que les metteurs en scène en France sont à l’affût d’une tête d’affiche, entourée de quelques copains de la bande, et négligent dans leur distribution ce qui a fait le succès et la qualité de notre théâtre et plus particulièrement de notre cinéma français, les seconds rôles et les silhouettes.

Il nous en restait un rare spécimen. Il vient de rejoindre ses acolytes des Branquignols au Paraclet des histrions, Pierre Tornade.

Dans le privé, il imposait le respect de par sa taille et son allure. Son talent était de se caricaturer avec humour et de se transformer en un personnage fat et hâbleur ou en accentuant un côté naïf qui le rendait éminemment sympathique .

Dès ses débuts dans les années 1960, il est à bonne école en intégrant la troupe des Branquignols, de Robert Dhéry avec qui il jouera plus tard La Grosse Valse et Les Branquignols. Son passage au boulevard lui donnera l’opportunité de travailler avec Robert Lamoureux et de jouer à plusieurs s reprises sa pièce Le Charlatan dans une mise en scène de Francis Joffo.

Par la suite, il se fait un nom en participant à de nombreuses séries télévisées dont la plus connue est celle de Thierry La Fronde et plus tard celle de Vidocq.

Essai transformé au cinéma en reprenant le répertoire exercé sur les planches avec Robert Dhéry, Allez France, Le Petit Baigneur et Vos gueules, les mouettes ! avec de Funès Le Gendarme à New York, Le Grand Restaurant et Le Tatoué, maissurtout avec Robert Lamoureux, dans le rôle cocasse du Capitaine Dumont, Mais où est donc passée la septième compagnie ? et On a retrouvé la septième compagnie.

On ne peut faire l’impasse sur ses participations remarquées dans Un idiot à Paris de Serge Korber, Le Diable par la queue de Philippe de Broca, Adieu poulet de Pierre Granier-Deferre, et surtout son rôle du père de la victime dans Dupont Lajoie qui fait apparaître une facette méconnue de l’acteur, le sens de l’émotion.

Son palmarès est impressionnant : 70 films, 20 téléfilms et 45 participations à des séries. As du doublage pour les dessins animés, Pierre Tornade, sera la voix du savoureux frère Tuck dans le Robin des Bois de Wolfgang Reitherman, d’Averell Dalton dans trois dessins animés de Lucky Luke et de Baloo dans Le Livre de la jungle. Enfin, pour le plaisir de tous les enfants il est devenu un spécialiste des adaptations des bandes dessinées de René Goscinny et Albert Uderzo. Après avoir dans un premier temps donné sa voix à Abraracourcix, il est devenu à quatre reprises Obélix. Dans notre Panthéon il y a un grand banquet avec Obélix, héros débonnaire et invincible. Il dévore moult sangliers. Parfois il s’adresse à son ami Astérix avec la voix de bronze et chaleureuse de Pierre Tornade.

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