Civilisation
Entre sommeil et éveil
« Ils arrivèrent dans une vaste forêt que ne semblait traverser aucun sentier ».
Article consultable sur https://politiquemagazine.fr
Maxime Tandonnet nous a quittés brusquement l’an passé. C’était un ami que nous regrettons vivement.
Haut fonctionnaire, conseiller d’hommes politiques, soucieux de l’avenir de la France, comme de l’honneur et du respect de son passé, il ne craignait pas d’affronter les jugements de la bien-pensance officielle dans la certitude de ses convictions et avec sa parfaite droiture d’honnête homme. Il aimait plus que tout son pays, la France, qu’il servait de son mieux, se désolant de la voir décliner et se fracturer par des politiques insensées qu’il s’efforçait à son niveau de contrecarrer et de dénoncer. Il signait des articles remarqués et remarquables, notamment dans Le Figaro et sous pseudonyme dans Politique magazine. Il a écrit des ouvrages d’histoire et des biographies dont nous avons rendu compte ici. Quand il est décédé, il venait d’achever un livre sur Michel Poniatowski, sous-titré Un prince dans la République. Il a été publié chez Perrin en février 2025, par les soins de son épouse avec une préface d’Arnaud Teyssier en forme d’hommage.
Comme toutes les biographies de notre auteur, l’ouvrage est précis, mais aussi profondément humain. Il s’attache autant à l’homme qu’il décrit dans sa vie et ses aventures, qu’à ses idées, ses convictions, ses relations, ses engagements et ses évolutions et inévitables retournements, voire contradictions. Michel Poniatowski, d’ascendance prestigieuse, polonaise, italienne, française, européenne, vrai gentilhomme aussi courageux que pugnace sous des allures aristocratiques d’équanimité, par moment même de dédain de l’adversaire surtout quand il était pitoyable, cachait une vive intelligence et dissimulait une âme d’une sensibilité à fleurs de peau. Vrai résistant dès son adolescence, qui a tué du boche et non pas du français, écœuré par les horreurs de la Libération, il n’a jamais cherché à se mettre en avant. Et c’est ainsi qu’il s’est trouvé au service de son ami Valéry Giscard d’Estaing. Ce fut un long compagnonnage. Giscard lui doit tout ou presque tout. Il n’est pas sûr qu’il y ait eu un vrai retour sur tant de fidèle dévouement, malgré des marques incontestables de sympathie et même de copinage. Dès que Poniatowski s’est trouvé en difficulté avec les affaires qui éclaboussèrent le septennat et la République en son système propre, l’affaire Jean de Broglie en particulier, toujours non éclaircie comme tant d’autres, cela depuis De Gaulle et toute la suite et, bien sûr, y compris Mitterrand, Giscard et son entourage prirent leur distance. Le Prince, dans sa bonne foi outragée, savait mal se défendre en contre-attaquant brutalement. Bref, Giscard n’aimait pas sentir le soufre. Poniatowski, libéré de sa tutelle, se défoula en quelque sorte dans un rôle de Cassandre. Il devint anti-maastrichtien avec Seguin, lui l’Européen ; il fustigea l’Europe de Bruxelles ; il souligna les dangers imminents de l’immigration ; il perçut et dénonça l’évolution désastreuse des institutions de la Ve République. Il mourut lucide et sinon amer – il avait trop de tempérament – malheureux pour la France, son pays qu’il aimait tant. Sa consolation fut sa mairie de l’Isle-Adam, où sa famille continue sa lignée. Merci au cher Maxime pour cette belle biographie où il a mis lui-même son âme et ses convictions.

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