Editoriaux
Cierges et ministres
Il y a une semaine à peine, une grave question agitait le monde politique : qui allaient être les ministres délégués aux Personnes en situation de handicap et aux Anciens combattants ?
Article consultable sur https://politiquemagazine.fr
Le 11 février 2020, le Vestibule de Harlay, au fond du Palais de Justice, le vrai, celui qui s’élève au cœur de la Cité, grouillait de robes noires. Nous devions être plus d’un millier, en assemblée générale réunie à l’appel de notre Bâtonnier.
Le Gouvernement a réussi à faire l’unité de la profession, à mettre ensemble dans un combat commun des êtres qui, par nature, sont des individualistes forcenés. Prodige involontaire, mais qui révèle, au-delà de la question de la retraite, une colère partie du fond du cœur. Ces avocats en robe ont dit qu’ils s’opposeraient au vol de leur retraite. Déjà l’argument est, à lui seul, suffisant. Les Ordres ont constitué une caisse de retraite sans aucun secours d’argent public, avec les seules cotisations des avocats.
Leur gestion prudente leur a permis, à la fois, de verser aux retraités une pension convenable et de prévoir des réserves jusqu’en 2050. Pas d’âge pivot, ni de date critique. La réserve est de deux milliards d’euros. Et c’est à cette institution – ô combien honorable – que l’État dit : je vous absorbe dans le régime général. Je prends vos réserves qui serviront à payer les frais de la transition et je vous soumets au régime commun qui doublera vos cotisations et diminuera de moitié votre pension, mais ainsi vous contribuerez à la solidarité nationale. Où est l’accord possible ?
Les « régimes spéciaux » ont négocié, depuis des semaines, le maintien de leurs avantages acquis. Ils n’avaient pas à lutter contre le régime général puisqu’ils sont dedans. Ils luttent pour des privilèges à l’intérieur du système. Pour les avocats, la question est tout autre. C’est principe contre principe. Liberté de la profession contre omniprésence de l’État.
Les avocats ont décidé de reconduire la grève. Mais cela suffira-t-il ? Une voix s’est élevée pour proposer la grève de l’impôt. Les avocats collectent la T.V.A. Ils pourraient consigner cette T.V.A. sous le séquestre du Bâtonnier. Un frisson a parcouru le dos des officiels. L’orateur avait dit « toute lutte véritable pour la liberté commence par la grève de l’impôt ».
Sire, ce n’est pas une révolte, c’est la révolution !
On n’en est pas encore là.
Mais il ne faut pas jouer avec la colère des hommes en robe.