Civilisation
Vauban pour toujours
1692, le duc de Savoie franchit le col de Vars, emporte Embrun, puis Gap. Louis XIV demande à Vauban de fortifier le Queyras.
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Comme en histoire de l’art, la littérature offre parfois des découvertes ou bien extirpe de l’ombre où ils étaient injustement plongés des auteurs de premier plan. Ce livre est un joyau, qui en annonce d’autres, espérons-le. Il ne s’agit que d’un choix de textes, parmi des centaines d’autres, jamais traduits en français, pas plus que les nombreux ouvrages de cet écrivain argentin hors du commun, inconnu du continent européen. Leonardo Castellani, prêtre, jésuite, suspendu puis expulsé de la Compagnie de Jésus pour de fallacieuses raisons, persécuté, rejeté par l’Église et par le monde, puis de nouveau réinvesti de ses pouvoirs sacerdotaux et courtisé en vain par les jésuites repentants, terminera sa vie en 1981 à Buenos Aires, retiré comme un « ermite urbain ». Si vous aimez Gustave Thibon, Léon Bloy ou saint Thomas d’Aquin (l’un n’excluant pas les autres), vous jubilerez en découvrant ces quelques écrits, ciselés, rédigés dans une langue parfois truculente, riche, dense, poétique et éminemment spirituelle. Castellani avait bien le verbe et le Verbe dans le sang. Il a échappé aux corruptions et aux perversions qui l’entouraient, ainsi qu’à tous les honneurs, les réussites, les distinctions donnés par les hommes, et il a passé sa vie à combattre, toujours dans la marge, à prophétiser, à exercer son regard intérieur sur les bouleversements sociaux et ecclésiaux. Il pourfend le pharisianisme et la démocratie, le modernisme et les baudruches contemporaines, écrivant par exemple dans Le drame du Christ : « (…) La fine fleur du pharisianisme est la cruauté : la cruauté sournoise, cauteleuse, lente, prudente et souterraine, qui va jusqu’à mettre à mort tout en croyant obliger Dieu. Essentiellement homicide et déicide, le pharisianisme tue l’homme à cause de ce qu’il y a de Dieu en lui. » (p.259) Un tel auteur ne peut que nous secouer de notre somnolence, de notre indifférence, de nos médiocres soucis et de nos combines égoïstes. Il rugit, il aboie, il miaule, il murmure, il caresse, il apaise, tout en brassant, grâce à une culture encyclopédique, tout ce que le monde a pu produire de meilleur, et en égratignant tout ce qu’il offre de pire. Ecrivain maudit, canard jésuite boiteux, curé ensoutané, il nous conduit dans un univers « périphérique » (puisque telle est la mode du moment) qui a peu de chose en commun avec ce qui est encensé aujourd’hui car il ne touche qu’à l’éternel et il ne se soucie que de l’âme. Bref, il est eschatologique et donc nourrissant et consolateur.
P. Jean-François Thomas s.j.