L’acteur de cinéma égyptien Omar Sharif, né Michel Demitri Chalhoub le 10 avril 1932 à Alexandrie est mort au Caire le 10 juillet 2015 à l’age de 83 ans.
Le Shérif Ali ibn el Kharish, galope sur son chameau, il vient des confins du désert, on ne sait s’il surgit du sable ou de la mer, il va à l’encontre de l’officier anglais qui vient de boire impunément l’eau du puit qui lui appartient. Personnage mythique, il est le symbole du prince Bédouin. A-t’il existé ? Seul le vent des légendes, le Shamal qui souffle sur la contrée de Rub al-Khali, dans le grand désert d’Arabie, pourrait nous répondre.
Quant au lieutenant de sa Gracieuse Majesté de Grande Bretagne, Sir Lawrence, il deviendra l’ami indéfectible du prince bédouin. Leurs incarnations furent imprimées sur la pellicule. Le Lieutenant-Colonel du Cinéma, Peter O’Toole a faussé compagnie à son partenaire, le 14 décembre 2013. Le Prince l’a rejoint le 10 juillet 2015 au Caire. Il s’appelait Omar Sharif.
Les deux mythes s’étaient croisés, ils se rejoignent pour toujours.
Acteur polyglotte
Il étudie au Collège britannique Victoria d’Alexandrie où il pratique le français ainsi que cinq autres langues : l’arabe, l’anglais, le grec, l’italien et le turc, ce qui lui permettra de doubler lui-même nombre de ses films.
Diplômé en mathématiques et physique, il va à Londres pour apprendre son métier d’acteur à la prestigieuse Royal Academy of Dramatic Art, la même qui reçut Peter O’Toole au cours des mêmes années.
En 1954, il est de retour en Égypte et débute dans Le démon du désert de son compatriote le cinéaste Youssef Chahine. l enchaînera avec lui Les Eaux noires, où il rencontrera la star égyptienne de l’époque Faten Hamama qu’il épousera. Lorsqu’en 1962, il joue le rôle du prince du désert Ali Ibn Kharish, dans Lawrence d’Arabie de David Lean, aux côtés de Peter O’Toole, il est déjà une vedette du cinéma égyptien après avoir tourné 26 films.
Ce rôle lui vaut une célébrité mondiale immédiate, ainsi qu’un Golden Globe du meilleur acteur dans un second rôle 1963 et une nomination pour l’Oscar du Meilleur Second Rôle 1963.
Une carrière menée tambour battant
Omar Sharif joue alors dans plus de 60 films américains et européens avec de prestigieux metteurs en scène dont Anthony Mann, Francesco Rosi, Henri Verneuil, Sidney Lumet, Andrzej Wajda. Ses nombreux partenaires appartenaient au Gotha des grands acteurs, James Coburn et Anita Ekberg, Anthony Quinn, Catherine Deneuve, Jean-Paul Belmondo, Sophia Loren, Barbra Streisand, Michael Caine, Gregory Peck, Julie Andrews, Claudia Cardinale, Ingrid Bergman, Anouk Aimée, Jane Seymour, Lea Massari, Antonio Banderas, et à la télévision Jeanne Moreau et Ava Gardner…
Attiré par les grands personnages historiques, il interprète au cinéma et à la télévision, Genghis Khan, Che Guevara, Nicolas II de Russie, le capitaine Némo, Saint Pierre. Ces fresques et légendes étaient pour la plupart des adaptations de célèbres romanciers dont Joseph Kessel, James Hadley Chase, Jean-Paul Sartre, Fedor Dostoïevski…
En 1965, il rejoint son metteur en scène fétiche, David Lean, pour un triomphe mondial avec Le Docteur Jivago. Il obtient pour ce rôle le Golden Globe Award du Meilleur Acteur.
Quelques grands succès
Il participa aussi à de grands succès que furent La Nuit des généraux d’Anatole Litvak (1967)Mayerling de Terence Young(1968), Les Cavaliers de John Frankenheimer(1971), Le Cassed’Henri Verneuil (1971),Les Possédésd’Andrzej Wajda(1988) et à de nombreuses fictions et épopées à la télévision. On notera avec un immense plaisir sa participation en 1990, dans le rôle du Consul d’Aninot, au téléfilm Le Roi de Patagonie de Stéphane Kurc et Georges Campana adapté d’un roman de Jean Raspail.
On ne saurait omettre ses interprétations pleines de sensibilité et de profondeur comme celles du père attentionné dans Mayrig d’Henri Verneuil, tourné en 1992, etson rôle d’humaniste dans Monsieur Ibrahim et les Fleurs du Coran, de François Dupeyron en 2003, pour lequel il sera récompensé par le César du meilleur acteur, film nommé au Golden Globe Award du Meilleur Film Étranger.
Cette grande carrière sera accompagnée par plus de quinze récompenses et nominations dont trois Golden Globe, Trois Laurel Award, un Oscar et un Lion d’or pour sa carrière à la Mostra de Venise.
Tout au long de sa vie riche en péripéties il pratiqua l’art du bridge, jeu qui ne cède en rien au hasard mais qui exige un grand sens de la tactique. Il participa aux Olympiades de Bridge de Deauville, représentant l’équipe d’Égypte, et devint vice-champion de France open en 1971, puis vice-champion d’Europe seniors par équipes en 1999 à Malte. Il était aussi passionné par les courses hippiques.
Le 12 juillet 2015, dans une mosquée du Caire, ses obsèques ont été célébrées. Il a été inhumé au cimetière Sayyeda Nefissa, au sud de la ville.
Chaque témoin a pu jeter trois poignées de terre sur le corps. Selon la loi musulmane, il a été enveloppé d’un linceul dont les nœuds ont été préalablement dénoués. Ses pieds orientés vers la Mecque. Son regard, lui, en direction du Saint Sépulcre. Il était le fils de Joseph Chalhoub. Elevé par son père dans le rite grec-catholique melkite, il s’était converti à l’islam pour épouser l’actrice musulmane égyptienne Faten Hamama. Après leur divorce, il ne se remariera jamais : elle était la femme de sa vie.