La genette est une bête de la nuit qui ressemble à une petite panthère aux yeux de lémurien et à la longue queue annelée. Une hermine revêtue d’un camouflage, une belette surdimensionnée.
Il semblerait qu’elle ait été introduite en Europe, depuis l’Afrique par les Romains qui cherchaient un prédateur pour empêcher les rongeurs de dévorer les récoltes. Yann Liotard en a aperçu une, une fois, il y a longtemps : l’animal trotte encore, tout vif, dans sa mémoire et presque dans ses veines. Voilà qu’il la raconte, dans un petit livre éclaté où se mêlent histoire naturelle et évocations littéraires, géographie historique et récits d’attente, car on ne chasse pas la genette, on l’attend, à l’ombre des châtaigniers ou des figuiers, car elle en est friande. Buffon prétendait qu’il n’y en avait pas en France : mais le 10 février 1774, dans les Affiches du Poitou, un lecteur affirmait avoir vu des genettes en vente sur un marché, car la fourrure de la genette est « légère et très jolie » et elle fournit du musc. C’est bien simple, la genette est le seul représentant des viverridés en Europe, et cela dit tout ; et la Genetta bourloni, découverte en 2003, a été nommée ainsi en hommage à un gardien du zoo de Vincennes mort à 23 ans à cause d’un lion. La Genette n’est pas un livre, c’est un carnet de notes, une serviette pleine de papiers qu’on n’a pas encore classés, une conversation de noctambules, à l’heure où on révèle ses passions les plus secrètes et où on cherche à tout prix à les faire partager, entassant devant l’auditeur ou le lecteur le riche butin de nos veilles : savez-vous que la genette appartient à l’héraldique féminine ? Ah ! Et on la croise vagabondant dans les fils de La Dame à la licorne. Liotard, humaine genette, en profite pour nous donner un petit aperçu vagabond du travail de ceux qui restaurèrent la tapisserie. On le suit. On le lira à l’ombre d’un châtaignier ou d’un figuier.
Yann Liotard, La Genette. Petite biographie d’une furtive. Klincksieck, 2025, 136 p., 17 €
