Civilisation
Vauban pour toujours
1692, le duc de Savoie franchit le col de Vars, emporte Embrun, puis Gap. Louis XIV demande à Vauban de fortifier le Queyras.
Article consultable sur https://politiquemagazine.fr
Ce livre est tout d’abord une compilation de témoignages. Il est foisonnant mais parfois répétitif et souvent touffu. On se perd un peu dans la pléiade des personnages cités et invoqués. C’est un patchwork aux coloris divers, nourri par les moult rencontres du journaliste au cours de ce que fut notre guerre d’Indochine.
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Très jeune, Jacques Chancel, avide d’aventures, s’engage dans l’Ecole des transmissions de Montargis et choisit de s’engager auprès des forces d’interventions en Indochine.
Une série d’événements lui permettra de rejoindre la Radio-France-Asie et de devenir responsable, en compagnie de son amie Marina, d’une émission très populaire auprès de l’ensemble du contingent : Le Disque du Soldat.Les invitations pleuvent, les spectacles pour les armées permettent la venue de Joséphine Baker et de l’humoriste Roger Nicolas avec son fameux : Ecoute ! Ecoute !
Cette nouvelle notoriété l’amène à fréquenter les figures les plus pittoresques de cette société bigarrée, où se mêlent et s’entrecroisent chefs de guerre,
journalistes, décideurs politiques, aventuriers, propriétaires d’immenses exploitations… et grands soldats. Au détour de certains chapitres, apparait l’Impératrice Nam Phuong, épouse de Bao Dai, monarque renommé pour être un grand chasseur mais qui ne fut pas un grand roi !
Cette période est aussi l’occasion d’une profonde immersion dans ce monde secret de l’extrême orient avec sa philosophie, son érotisme et… son opium.
Au cœur même de la guerre
L’auteur ne se contente pas de ces mondanités. Il accompagne aussi les guerriers sur le lieux de combat. Survient la rupture (Chapitre 16).Le Capitaine Prestalle lui demande d’assister et de rendre compte d’une attaque sur le point stratégique de Khanh Hoi, situé à quarante kilomètres de Saigon, tenu par les Viets. Il est au bord de la jeep de commandement, en compagnie de Michel Fontaine, et traverse un pont : « Une explosion, terrible tremblement, une gerbe de feu et puis plus rien ».
Transporté à Gia Dinh par les infirmiers de La Légion Etrangère, le journaliste se réveillera dix jours plus tard. Les éclats de mine ne l’ont pas épargné, mais le choc qu’il a subi a eu pour conséquence une commotion cérébrale qui le laisse aveugle. Jacques Chancel à 20 ans ! La longue traversée de la nuit à la lumière, grâce à l’aide du personnel soignant et à la science d’un ophtalmologue émérite cambodgien, sera son chemin de Damas.
Concomitamment, sa perception du drame qui se déroule en Extrême-Orient en sera considérablement modifiée. Après l’ivresse des reportages, émissions radiophoniques, mondanités, folles nuits et rencontres à l’hôtel Continental, l’incontournable palace de Saigon, il adopte alors, avec le recouvrement de sa condition physique, une vision politique et humaine toute autre. Tout est-il foutu ? En métropole, les intellectuels en vue, compagnons de Jean-Paul Sartre, crachent sur le colonialisme et méprisent les hommes qu’ils ont envoyés à l’abattoir. Et, en Indochine, la déliquescence des états-majors, la corruption des fonctionnaires et l’appât du gain des coloniaux, ont pour conséquence de livrer un peuple de culture ancestrale aux forces totalitaires inspirées par Lénine et consorts.
Son compagnon Bernard meurt au combat. Il était le fils du maréchal de Lattre de Tassigny, illustre commandant de la Iére Armée de Libération, puis Haut-Commissaire en Indochine. Le décès de son fils et les manipulations politiques de la métropole le font quitter, meurtri, ce pays qu’il était le seul à pouvoir secourir. La débâcle s’instaure avec, en point d’orgue, Dien Biên Phu… Terrible défaite, imposée par les forces du général Vô Nguyên Giap. Elle sonna le glas de cet Empire de cristal, fragilisé par la bêtise des hommes et la lâcheté des politiques : « Nous avons été trahi par les mollassons du gouvernement français et de leurs vassaux, les chefs de notre armée : la bataille est perdue depuis le premier jour, on nous a envoyé au massacre, il y aura des milliers de morts parmi les nôtres. » (Témoignage d’un officier).
L’auteur part alors en reportage et tente de retrouver son confrère, Pierre Schœndœrffer, qui s’était porté volontaire pour être parachuté sur les lieux de
l’affrontement. A l’issue de la bataille, il avait été fait prisonnier par les Viets Minhs. C’est un responsable lié à la rébellion, francophile, plus nationaliste que communiste, qui lui apprendra sa survie dans un des camps d’où ne reviendront qu’à peine 40 % des détenus.
Ce cri désespéré, dans un récit parfois décousu mais animé par un style épique, évoque aussi les parcours des fils de Kessel, ces grands reporters et cinéastes de notre temps que furent Lucien Bodard, Jean Lartéguy, Max Clos, André Le Bon, Georges Kowal, l’américain Dixie Reese, Raoul Cotard, Péraud, Pierre Schœndœrffer et aussi Geneviève de Galard, l’héroïque infirmière de Dien Biên Phu .
Un livre à découvrir ou à relire, rédigé par un pionnier de la télévision française à l’époque où elle avait pour vocation d’être intelligente, cultivée et humaniste.
La nuit attendra de Jacques Chancel, Flammarion, 354 pages, 19,90€.
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