Civilisation
Vauban pour toujours
1692, le duc de Savoie franchit le col de Vars, emporte Embrun, puis Gap. Louis XIV demande à Vauban de fortifier le Queyras.
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L’écrivain et poète suisse Charles Ferdinand Ramuz, aujourd’hui méconnu, fut cependant admiré en son temps, et Céline le considérait comme un de ses maîtres. Bien qu’il fut principalement romancier, il écrivit également plusieurs essais. Initialement publié en 1933, Taille de l’homme est d’abord une réflexion sur le communisme alors en pleine expansion. Ni détracteur ni apologiste, l’auteur se veut critique : « ni libéral, ni radical, ni bourgeois, ni capitaliste, dans mon coin ». S’il déplore le matérialisme des Soviets, et leur mythologie du progrès, il leur reconnaît du moins le mérite d’avoir conservé une forme de foi. Leur faute est peut-être plus pardonnable que celle des bourgeois qui leur ont donné naissance : « les bourgeois, les premiers, ont commencé à ne voir dans l’homme qu’une quantité et une quantité utilisable ».
On voit que ce qui se profile, derrière la critique du communisme, est une mise en cause de notre modernité elle-même. Du fait que « la science du comment » s’est substituée à « la poésie du pourquoi », la machine à l’outil et le mécanique à l’organique. Plus que par la nature du régime, communiste ou capitaliste, la rupture anthropologique se signale par la disparition du paysan, cet homme qui nourrissait la société et se nourrissait lui-même, et qui, « voyant les étoiles, voyait Dieu ». N’étant pas encore perdu entre les deux infinis pascaliens, mais « placé en plein cœur de la nature », il connaissait sa place dans le cosmos, estimait sa taille entre la terre et le ciel. Par ce petit livre, certes moins original qu’à sa sortie, Ramuz nous rappelle qu’« il n’y a de crise que métaphysique : l’économique ne fait que suivre », et que « le grand départagement », finalement, vient de ce qu’« il y a des hommes qui prient et des hommes qui ne prient pas ».
C.F. Ramuz, Taille de l’homme, Zoé, 2019, 140 p., 9€