Civilisation
Vauban pour toujours
1692, le duc de Savoie franchit le col de Vars, emporte Embrun, puis Gap. Louis XIV demande à Vauban de fortifier le Queyras.
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La petite maison R&N se distingue depuis plusieurs années par la qualité de sa ligne éditoriale, nous faisant découvrir ou redécouvrir des textes souvent méconnus de grands auteurs, comme Spengler, Drieu, Charbonneau, Pasolini, ou Sabato plus récemment. Les textes choisis ont souvent pour point commun de poser un regard critique sur la modernité, et en particulier sur sa dimension technicienne. C’est le cas de ce petit livre du philosophe franco-russe Nicolas Berdiaeff, grande figure de l’existentialisme chrétien, proche du personnalisme, marxiste repenti ayant dénoncé la Révolution soviétique comme Maistre l’avait fait pour la française.
Son analyse (parue en 1933) du phénomène technicien se base sur la distinction entre organisme et organisation. L’organisme est un ordre vital et créateur tandis que l’organisation est un ordre rationnel, mécanique et abstrait, qui se révèle mortifère. « La domination de la technique marque avant tout le passage de la vie organique à la vie organisée ». Ce changement a de lourdes conséquences sur la vie spirituelle. Car la technique moderne n’est pas un banal instrument, elle n’est pas neutre, elle bouleverse l’ensemble de la société, et provoque notamment une accélération du rythme de vie qui rend pratiquement impossible toute espèce de contemplation, de sorte que « l’homme manque de temps pour l’éternité ». Les innovations qui devaient grandir l’homme l’amputent en réalité de la part la plus importante de son être. La racine du mal, cependant, est antérieure au machinisme. Ce dernier aggrave le déclin de la foi mais ne l’a pas provoqué. « Le monde se déshumanise et la machine n’est qu’une projection de ce processus ». La seule solution pour éviter que l’homme ne finisse par se transformer lui-même en machine est de ranimer la foi en Dieu. Il ne s’agit pas de revenir au passé, mais de retrouver ce qui, dans le passé, est éternel, et d’initier ainsi, héroïquement, ce que Berdiaeff appelle, dans un autre livre, un « nouveau Moyen Âge ».