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L’irresistible ascension

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L’irresistible ascension

Voilà trois mois que Lana Del Rey, 25 ans, baladait sa petite moue de canard triste dans tous les talk-shows. L’album tant attendu est enfin arrivé !

Ne retenir que sa douce voix faussement désinvolte ne suffirait pas. Les clubs de jazz de la capitale ne recèlent que de ça, de belles voix… Il y a chez Lana Del Rey un art du placement qui bouleverse la structure harmonique et génère des envolées qui, frisant la dissonance, procurent une charge puissamment mélancolique et émotive à ses morceaux. Cette voix toujours légèrement à la traîne d’une rythmique basique séduit masses et puristes, et, par là même, démontre que le groove n’est pas réservé aux musiques cuivrées !

Si Lana Del Rey se distingue par son grain de voix, il est navrant que la plupart des critiques s’arrêtent là. Car, sans la magnificence des arrangements, l’album sombrerait comme tant d’autre dans la bouillasse commerciale dont la date de péremption est aussi soudaine que la mise en rayon. Lana s’inscrit dans un courant musical influencé par Björk – et comptant entre autres Ho Land et Agnès Abel – soutenu par une orchestration largement aboutie. Off To The Races est l’illustration de cette combinaison entre des sonorités modernes (samples) et un accompagnement classique, sur laquelle se greffent des lignes de voix mélodieusement improbables. On pense à l’univers déstructuré de Björk ou au caractère planant des œuvres de Radiohead. L’album est parsemé de cadences chopinesques, comme dans le single Video Games, dans lesquelles s’entrechoquent parfois les deux modes, majeur et mineur. L’on navigue alors entre des atmosphères joviales et funèbres, chaque accord de transition plaqué sonnant comme une chute vertigineuse. Harmoniquement, le projet est irréprochable.

Non, Lana Del Rey ne fera pas le superbowl

La polémique née de ses prestations en concert est ridicule. D’abord parce que son interprétation sur scène, bien différente de celle du disque, n’est jamais prise en compte, ce qui constituerait enfin un peu de fond dans la critique musicale. Ensuite parce que cette affaire révèle la trop importante place qu’occupe de nos jours le «show» dans l’univers artistique. Lana Del Rey n’est pas faite pour chanter lors de la finale du superbowl ; non, elle est plus… distinguée ! Il est étonnant de voir que cette prétendue mollesse en concert fasse couler autant d’encre, quand la vulgarité d’une Katy Perry ou d’une Mia – qui correspond tristement à l’air du temps -, est tout juste relevée. On devrait se féliciter de voir un nouveau courant, incarné par Lana Del Rey, qui a le mérite de s’en tenir uniquement à la musique pour exister : peut-être est-ce pour cela qu’elle essuie autant de critiques ?

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