Selon Michel Onfray, le Christ n’a pas existé (et Jean le Baptiste non plus, ni la ville de Nazareth).
Selon sa vieille habitude (c’est la quatrième fois qu’il nous assène sa thèse, avec son tout récent Théorie de Jésus), il ne s’embarrasse pas trop de science et préfère virevolter avec trois concepts étiques et une bibliographie périmée comme une vieille danseuse de gymnastique rythmique pourvue de rubans crasseux et de cerceaux fendus. Le spectacle est pénible. Mais il a suscité une véritable réponse, sous forme de livre argumenté, tel celui que J.-M. Salamito fit paraître en 2017. Matthieu Lavagna, dont on connaît les talents d’apologète, a empoigné le(s) livre(s) d’Onfray, les a mâchés puis recrachés : Onfray ne démontre pas que Dieu n’existe pas (gênant, pour un athée), adhère à une thèse mythiste que les historiens compétents rejettent, méconnait tous les travaux scientifiques de ces 50 dernières années, ment effrontément sur les méthodes de la critique des sources historiques, produit des contresens grossiers sur les Évangiles, ne connaît pas l’histoire antique – ou plutôt choisit de l’ignorer… On est un peu confondu par tant d’ignorance péremptoire que Matthieu Lavagna démonte et dépiaute minutieusement : mais qu’est-ce qu’Onfray est allé faire dans cette galère ?! Théorie de Jésus ne prouve que deux choses : Onfray n’a rien lu de sérieux, il n’a même pas su lire les Évangiles, affirmant qu’il y manque nombre d’éléments qui, en fait, s’y trouvent ; et il préfère les apocryphes aux textes canoniques, trouvant les seconds moins crédible que les premiers. Lavagna s’en étrangle parfois de juste et scientifique indignation : Onfray, c’est du travail de sagouin. Alors que cette réponse est celle d’un homme qui s’est abreuvé aux bonnes sources (dont tous les historiens athées), d’un philosophe épris de logique, d’un catholique, enfin, qui bondit quand on accuse le Christ d’être antisémite et l’Église d’avoir répondu de méchantes fables. L’auteur démontre admirablement qu’Onfray dresse des épouvantails à sa mesure et selon ses aprioris puis nous demande de les trouver laids sans jamais avoir prouvé que ses simulacres correspondaient réellement à la réalité de ce qu’il attaque. On pourrait trouver assommantes tant de pages destinées à nous convaincre qu’Onfray vaticine, mais, en creux, cette réfutation est un vrai traité d’apologétique : ne boudons pas notre plaisir de voir Onfray étrillé et la vérité si bien servie.
Matthieu Lavagna, Libre réponse à… Michel Onfray. Non, le Christ n’est pas un mythe, Artège, 2024, 260 p., 18,90€