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Hypermorale délétère

Henri Bergson nous a enseigné que l’homme s’abreuvait à deux sources de la morale : la première est issue des habitus d’une socialité instinctive que le jeu de l’évolution a instaurés progressivement, par sédimentation ; la seconde ressortit à l’« élan vital », puisé au plus profond de l’individu, dans les replis mystérieux de son énergie émotionnelle.

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Hypermorale délétère

La morale sociale face à la morale du héros qui sommeille en chacun de nous, en quelque sorte. Avec Arnold Gehlen (1904-1976), qui s’inspirera du Français, l’on franchit une étape qualitative. Grande figure de l’anthropologie philosophique, dont il fut un éminent représentant dans le sillage du philosophe Max Scheler, l’auteur de L’Homme. Sa nature et sa position dans le monde (récemment traduit et paru en 2021), livre magistral dans lequel il énonce sa formule, devenue canonique, selon laquelle : « la position singulière de l’homme est d’être par nature un être de culture » (voulant par là signifier, que l’homme est l’animal le plus fragile de la nature ; en retour, celle-ci le contraint à adopter des stratégies de compensation en développant des compétences pluri-spécialisées qui rendent ainsi possible sa survie), se livre à une anthropogenèse (laquelle, en l’espèce, se mue en véritable phylogenèse) de ce qu’il appelle l’« hypermorale ». Il commence par identifier quatre instances de la morale (ou « instances éthiques originelles ») : l’éthos élaboré à partir de la réciprocité ou morale du devoir qui aurait son siège dans le droit naturel (la justice ou le don, par exemple) ; la morale instinctive ou vitale qui conditionne la survie même de l’espèce humaine ; la morale sociale dont la famille (et toutes les valeurs qu’elle cultive : solidarité, amour, etc.) représente l’expression primordiale ; et enfin la morale propres aux institutions (dont l’État) et engendrée par elles. Mais, ces instances régulatrices de la vie sociale ont subi des inflexions, quand elles n’ont été dévoyées en « hypermorale », soit une excroissance des vertus morales particulières au-delà de la sphère privée ; ou plutôt, une extensivité du privé vers la sphère publique (tendances que Carl Schmitt et Julien Freund avaient parfaitement entrevues).

Au dissolvant nietzschéen s’est substitué l’hypermorale

Gehlen pointe l’alliance de l’eudémonisme des masses, apparu au siècle des Lumières avec l’humanitarisme, cet « amour indifférencié du genre humain érigé en devoir éthique » (ou encore l’« extensibilité de l’éthos de la famille »), puisant, quant à lui, ses racines dans l’Antiquité. Les institutions politiques ne joueraient plus leur rôle d’endiguement et permettent l’immixtion des valeurs familiales dans les affaires de la Cité (au prix de collisions inévitables entre des impératifs éthiques bien souvent contradictoires, l’éthos privé n’étant guère commensurable à l’éthos public). Gehlen relève d’ailleurs la part indue occupée par les valeurs féminines qui ruinent jusqu’aux fondements mêmes de l’État « réduit à un appareillage du bien-être ». Là où Nietzsche aurait volontiers parlé de « moraline », ce dissolvant du ressentiment, ce pousse-au-« crime contre la vie », Gehlen déplace le curseur des faibles, « guidés par l’intention cachée de se venger de la vie », vers les vrais « dominants » qui constituent la « contre-aristocratie » des intellectuels, ces privilégiés « qui n’ont pas à répondre des suites de leur agitation » (ces « élites » politico-médiatiques coupées du réel, telles que nous les dénommerions aujourd’hui). Au dissolvant nietzschéen s’est substitué l’incoercible pouvoir corrosif et corrupteur de l’hypermorale (que l’on pourrait tout aussi bien qualifier de « prêt-à-penser », tant, précisément, rompt-il toutes les amarres avec une pensée authentique, c’est-à-dire ascétique et méditative autant que critique, donc exigeante) sur l’esprit public. L’hypermorale n’est rien d’autre qu’une machine à araser les traditions : « l’hypertrophie morale s’intègre à merveille dans un système fondamentalement biologique, largement ouvert sur le futur, puisqu’elle implique d’emblée l’acceptance [sic] de tout ce qui pourrait advenir. On liquide par conséquent, en toute logique, ce que les temps anciens nous ont transmis d’éthos institutionnel, de morale sexuelle ou de réserve dans les rapports réciproques, la formule générale étant le « préjugé » – concept apparu dans la Venise décadente du XVIIIe siècle, où Carlo Gozzi affirmait : ’’La morale se tient coite au mot magique de pregiudizio’’ ». Qui ne reconnaîtrait derrière cette hypermorale l’autre nom de la délétère idéologie du progrès ?

 Arnold Gehlen, Morale et hypermorale. Krisis, 2023, 278 p., 26,50€.

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