Tribunes
Que faire ?
Adieu, mon pays qu’on appelle encore la France. Adieu.
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Beaucoup moins connu que son ami G. K. Chesterton, l’Anglais Hilaire Belloc (1870-1953) n’en est pas moins un auteur catholique capital du XXe siècle à l’œuvre très diverse et étendue. Aussi, la traduction de The Great heresies (1938), effectuée par Benjamin Ferrando, a pour premier mérite de donner à connaître aux lecteurs francophones une œuvre remarquable à plus d’un titre.
Dans le prologue de l’ouvrage en français, le traducteur présente l’historien Hilaire Belloc et aide à saisir toute la portée de ces Grandes hérésies. Cette présentation replace l’auteur dans son époque et dans son contexte social et littéraire. Il n’est, en effet, pas du tout superflu de donner à connaître Belloc et de montrer quelle est son importance dans le débat d’idées entre les deux guerres.
Dans une introduction remarquable, Belloc commence par donner une définition de l’hérésie. Plus qu’une définition, il s’agit, à dire vrai, d’une limpide synthèse philosohique : « l’hérésie est l’entreprise de démolition d’un corps de doctrine unifié et homogène par la négation d’un élément inséparable de l’ensemble ». Aussi si l’hérésie est d’abord manifeste dans le domaine religieux, elle peut parfaitement le déborder et se signaler sous un avatar plus profane. Cette introduction est capitale puisqu’elle fait du livre autre chose qu’un catalogue des hérésies ou une histoire de celles-ci.
Du reste, Belloc ne parle pas de toutes les hérésies – travail qui serait colossal ! – mais il choisit de grands moments de crise qui, selon lui, sont les plus importants et qui donnent davantage à comprendre la période contemporaine. Ainsi sont traités l’arianisme, l’islam (il s’agit pour lui d’une hérésie de l’extérieur), la crise albigeoise, celle de la Réforme, celle de la modernité et enfin l’entreprise de destruction contemporaine se manifestant à tous les plans de la vie en société.
Il ne faut pas s’attendre, je l’ai dit, à une histoire de chacune des hérésies étudiées mais plutôt à une vision synthétique où sont envisagés les tenants et aboutissants de chacune de ces erreurs ; aboutissants qui nous concernent encore aujourd’hui. Il y a parfois dans l’ouvrage des accents proprement prophétiques et en particulier dans la partie concernant l’islam : « J’examinerai maintenant les raisons pour lesquelles cette conviction d’une prochaine résurgence de l’islam occupe l’esprit de plusieurs observateurs et voyageurs – dont je fais partie. […] Pour ma part, je crois fermement qu’une de ces grandes choses inattendues sera le retour de l’Islam. […] L’homme féru d’histoire est forcément amené à se demander si nous ne pourrions pas, dans un futur proche, assister à une restauration de la puissance politique mahométane. »
C’est indubitablement avec profit qu’on lira ce livre intelligent au style alerte et érudit. La lecture permettra de disposer de certaines clefs pour comprendre le relativisme et le dogmatisme de notre époque.