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Exhortation au sportif

Ami sportif professionnel, tu as travaillé dur pour être parmi les meilleurs dans ton domaine. Cela te permet aujourd’hui de gagner confortablement ta vie – et même très grandement si tu es un footballeur jouant en Ligue 1 – et de jouir d’une certaine notoriété – et même parfois d’une immense notoriété si tu es un footballeur.

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Exhortation au sportif

Tu apprécies tout cela, d’autant plus que tu n’ignores pas que cette gloire argentée sera fugace, quelques années tout au plus. Alors tu continues à travailler dur, pour essayer de te maintenir le plus longtemps possible au sommet de ton art et de tes possibilités. Seulement voilà, depuis quelques années, être un honnête artisan du sport ne suffit plus. On te demande aussi, avec de plus en plus d’insistance, de « prendre position », de manifester publiquement ton soutien à des « causes » que l’on te présente comme incontestables. Porter un brassard pour ceci ou pour cela, mettre un genou à terre ou observer une minute de silence pour telle ou telle raison, bref, on te somme de sortir de ton domaine d’expertise – très limité mais bien réel – pour te faire le porte-drapeau de… de quoi d’ailleurs ? Tu ne sais pas trop en fait, et tout cela te met mal à l’aise.

Mais tu n’oses pas trop dire non. La politique, ce n’est pas ton fort et tu n’as jamais eu beaucoup l’occasion, ni forcément l’envie, de réfléchir à toutes ces questions sur lesquelles, aujourd’hui, on te presse d’avoir un avis. Alors, bon gré mal gré, tu te laisses bousculer et tu finis par faire ce que tu as l’impression qu’on attend de toi – mais, au fait, qui est ce « on » ? – mais ton malaise persiste, et tu as l’impression, nette mais persistante, que l’on t’a forcé la main. Et cela te déplaît. Ami sportif professionnel, tu as raison d’être mal à l’aise. Et tu aurais entièrement raison de refuser toutes ces démonstrations publiques qui te sont plus ou moins imposées. Tout ce qui te manque, dans le fond, ce sont des raisons de résister. Les voici.

Tout d’abord, toutes ces démonstrations et ces « gestes de solidarité » ne servent strictement à rien. Plus précisément, ils ne servent absolument pas la cause qu’ils sont censés servir. Voir des sportifs mettre un genou à terre parce qu’un délinquant noir a été tué par la police américaine va-t-il faire reculer le racisme où que ce soit dans le monde ? Absolument pas. Que des sportifs arborent un brassard multicolore pour soutenir « les droits des personnes LGBTetc. » va-t-il améliorer la condition des dites « personnes LGBTetc. » quelque part sur la planète ? Pas le moins du monde. 

Les leçons des clafoutis des écrans

Ces « manifestations de solidarité » commandées ne sont rien d’autre que des espèces de sermons, et qui donc apprécie d’être sermonné ? Personne, à part peut-être quelques vieilles bigotes à chaufferettes, qui trouvent dans le plaisir d’imaginer la damnation d’autrui une compensation à tous ceux qu’elles se refusent. Qui donc change de comportement parce qu’il est sermonné ? Personne, à moins d’être singulièrement lâche et dépourvu d’amour-propre. Au contraire, être sermonné donne plutôt l’envie d’en remettre une couche, de surenchérir dans ce qui vous est reproché. Surtout lorsque le sermon vient de gens que l’on paye des millions pour taper dans une balle et pour ensuite débiter trois platitudes apprises par cœur devant un micro.

Pardonne-moi, ami sportif, mais c’est exactement ainsi que tu es perçu lorsque tu te fais le « porte-parole » des causes sociales ou politiques à la mode : un enfant gâté, qui ne connaît de l’existence que les limites très étroites de son centre d’entraînement et de sa discipline sportive et qui se permet de donner des leçons à la terre entière. Tous ceux qui aiment le sport t’admirent lorsque tu donnes un exemple d’excellence physique, tout le monde te méprise lorsque tu prétends donner des leçons de morale sans y avoir aucun titre.

Car, et c’est le second point, en te demandant de « montrer ta solidarité » avec telle ou telle cause, on te fait sortir de ton domaine de compétence pour te faire parler avec autorité sur des questions où ton avis n’a pas plus de valeur que celui de monsieur tout le monde. Cela te fait bien rire lorsqu’un quidam qui a à peu près la condition physique d’un clafoutis et qui pratique le sport uniquement devant son écran plat prétend t’expliquer la manière dont tu aurais dû te comporter lors de tel ou tel match. Eh bien c’est exactement la même chose lorsqu’on te demande de te prononcer sur des questions de politique internationale, ou sur la politique américaine, ou sur la politique française, ou en fait sur n’importe quelle question morale ou politique. Tu n’y connais rien, en tout cas pas plus que le quidam moyen à qui tu viens pourtant faire la leçon en profitant indûment de ta notoriété acquise sur les terrains de sport. Et tu en connais certainement beaucoup moins que tous les responsables politiques à qui tu fais aussi la leçon car eux au moins, malgré tous leurs défauts, savent par expérience à quel point la politique est un art difficile. Infiniment plus difficile, en fait, que celui qui est le tien. Ami sportif professionnel, si tu as un peu de respect de toi-même, tu ne voudras pas te comporter comme un vulgaire acteur hollywoodien. 

Un acte de soumission

Et puis enfin, et puis surtout, tu te fais sans le savoir l’agent d’un fanatisme et d’une intolérance dont tu finiras toi-même par être la victime. Car ceux qui te demandent avec insistance, par exemple, de porter un brassard pour « défendre les droits des personnes LGBT…etc. » au Quatar savent parfaitement que les Quataris se moquent de tes brassards comme de leur première Ferrari. Bien sûr qu’il ne fait pas bon être homosexuel dans un pays musulman. Mais tous les brassards du monde ne changeront rien à ce fait. En revanche ces brassards ont bien une fonction : ils ont pour fonction d’intimider ceux qui, dans nos démocraties, ne sont pas d’accord avec toutes les revendications de ceux qui se présentent comme les porte-paroles des « personnes LGBT…etc. ». Lorsque tu portes un brassard ou que tu mets un genou à terre, tu démontres en acte la puissance de ceux qui portent ces revendications, puisque tu te soumets à leur demande. D’autant plus que l’on sait bien que le milieu sportif n’est pas, par nature, le plus tolérant qui soit envers les formes, disons, différentes de sexualité. Un peu comme l’armée et pour des raisons assez semblables.

En faisant publiquement acte de soumission, tu envoies un puissant message d’intimidation à tous les gens ordinaires qui peuvent avoir des réserves vis-à-vis de ce qui est présenté comme un « droit des personnes LGBT…etc. », comme par exemple la PMA pour les couples de lesbiennes ou bien la GPA. En parlant la langue de bois du wokisme, ou en faisant les gestes qu’il exige, ce qui revient au-même, tu renforces son pouvoir sur les esprits. Lorsque la langue de bois du wokisme est parlée en direct à la télévision devant des dizaines ou des centaines de millions de téléspectateurs, ceux qui, dans nos démocraties, hésitent à parler contre les diktats des « éclairés » préféreront se taire face à une puissance qui semble universelle et inarrêtable. Et c’est bien l’effet recherché.

Ce qu’on te demande, en réalité, c’est d’apporter ton concours à une forme de propagande, la propagande qui prépare et accompagne toujours l’oppression. Et ne crois pas que cette oppression t’épargnera. Aujourd’hui déjà tu vois que des carrières peuvent être compromises pour quelques paroles trop franches ou pour une plaisanterie jugée inacceptable par la nouvelle inquisition. Demain ce sera pire. Et ce sera pire en partie à cause de toi, toi qui n’as pas su trouver la force de résister aux injonctions des « éclairés » lorsque c’était encore possible et qui leur a apporté ton concours, par faiblesse ou par paresse. Ami sportif professionnel, refuse poliment mais fermement toutes les demandes qui te sont faites d’être autre chose qu’un sportif. Tu donneras ainsi un exemple : un exemple de modestie et de force morale, qui est bien plus précieuse et plus rare que la force physique.

 

Illustration : Hugo Lloris, capitaine des Bleus, a déclaré le 14 novembre en conférence de presse qu’il n’arborera pas le brassard arc-en-ciel LGBT au Qatar. « Lorsqu’on est en France, lorsqu’on accueille des étrangers, on a souvent l’envie qu’il se prêtent à nos règles, qu’ils respectent notre culture ».

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