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Et ils mirent Dieu à la retraite

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Et ils mirent Dieu à la retraite

Didier Le Fur est un historien de grand talent. À l’art de la biographie brillante – car c’est un art, sauf à être aussi fastidieux qu’ennuyeux – il ajoute la fulgurance d’une vision historique puissante qui, remontant du détail de l’analyse, s’élève promptement, comme l’éclair, en faisceaux de synthèse novatrice, illuminant et unifiant la compréhension d’une époque.

L’intelligence de l’histoire

Cet amoureux de la Renaissance – ou de ce qu’on désigne sous ce nom comme il s’en est expliqué lui-même – a su restituer à la fois et la singularité de la vie et le processus simultané de glorification de la personne qui caractérisent les princes prestigieux de cette époque, notamment les très chers Valois français, dans la suite d’ailleurs des Capétiens directs où déjà se composaient les récits fondateurs, et avant les Bourbons qui furent rois incontestables tant qu’ils maîtrisèrent leur manière d’être et leur représentation. On ne sait que trop ce qu’il en advint.

Le François 1er de Le Fur restera de ce point de vue un chef-d’œuvre. Comme sa Diane de Poitiers. Politique magazine s’est toujours fait un plaisir de rendre compte de ses ouvrages.

Sa dernière publication relève de l’essai. C’est puissant, rapide, synthétique et, cependant, fouillé jusqu’à la précision. Quand il résume un auteur ou une pensée, il suffit de lire pour savoir qu’il a vraiment lu ou qu’il a vraiment cherché à comprendre. C’est assez rare aujourd’hui où le polygraphe prolixe se contente de disserter ou d’extrapoler sur des séries de condensés historiques ou philosophiques pour étudiants en mal d’examens. Ces détestables pratiques expliquent la nullité de la formation politique en France où les mêmes erreurs se revivent indéfiniment. Faute de réflexion approfondie. Du moindre gamin qu’on abrutit de slogans martelés, au chef de l’État qui croit tout savoir et qui ne sait rien, c’est la répétition des mêmes poncifs uniformes qui sont censés expliquer la France. Cela, en dépit des multiples travaux qui auraient pu et dû changer les mentalités !

Rien n’y fait. Sans aborder vraiment cette question de fond, on devine que Didier Le Fur a une explication. Elle est sous-jacente. Son essai brosse une fresque de ce que furent les conceptions de l’histoire depuis le XVIe siècle jusqu’à nos jours. D’où le sous-titre de son livre : une brève histoire de l’histoire. Il se coule tellement dans la pensée des auteurs et des systèmes qu’il semble en adopter les présupposés et les jugements tour à tour théologiques, philosophiques, métaphysiques, scientifiques, enfin positivistes, sinon positifs, politiques, économiques, sociaux qui prétendent dominer et donc expliquer l’histoire, et cela encore aujourd’hui, en dépit de tout, au milieu de tous les essais de reconstitution historique qui se veulent d’allure purement expérimentale et où le témoignage et le document de vie sont mis en avant, car Le Fur pousse son enquête jusqu’à l’apparition en France des écoles historiques les plus récentes, celle de la Revue historique et de la Revue d’histoire moderne et contemporaine, puis celle des Annales.

L’erreur mortelle

De ce vaste tour d’horizon il ressort une évidence qui ne se perçoit qu’à la fin de l’étude dans la dernière phrase de la conclusion : « …En outre, personne n’avait trouvé les lois de cette histoire parfaite, définitive. Jamais non plus, elle ne réussit à réaliser ce qui habitait l’imaginaire des philosophes de l’histoire : rassurer collectivement sur la raison de l’existence humaine et contribuer à apaiser la peur de la mort, par une vie sans Dieu. »

Tel est le dernier mot du livre et telle est la raison du titre de cet essai : Et ils mirent Dieu à la retraite. En réalité, et tout compte fait, qu’y-a-t-il au bout d’une telle quête ? Un substitut de Dieu….et qui n’est pas Dieu, ce qui est toujours décevant ! Notre auteur le suggère, plus qu’il ne l’explique, ce qui est preuve de finesse. Le problème est que l’idée, même sous forme de faits, et d’amas de faits, ne comble pas le vide ! Le Fur cite deux exemples caractéristiques : les commémorations de la Révolution de 1989 à 1992 qui ne furent que de la propagande officielle et, depuis quelques temps, les prétentions à historiciser la construction européenne en lui trouvant des antécédents fabuleux jusqu’à Charlemagne. Nous sommes toujours en pleine mythification, ou plutôt mystification. Démocratiser l’histoire qui pourrait paraître un bienfait, revient trop souvent à la livrer au monstre dévorant de la politique qui, aujourd’hui, est plus que jamais partisane et idéologique. Où est donc passée la revendication d’autonomie de l’histoire ? Trop d’ouvrages, trop de colloques, trop de travaux et de cérémonies subventionnés et pourquoi ? L’État républicain serait-il Dieu ? Il y avait plus de libertés naïves – à interpréter bien sûr ! – dans les récits de nos pères et plus de compréhension dans le développement du dogme de Bossuet !

L’intelligence politique – et non la soumission – sera toujours nécessaire à l’historien et comment ne pas penser à ce sujet, et par exemple, au Napoléon de Jacques Bainville qui dit tout de l’homme dans son destin politique sans même que ce soit un livre d’archives et de documents, ce qui ne veut pas dire que ce travail préalable ne soit pas indispensable. Donner un sens intelligible aux évènements reste le but premier de l’historien.

L’intelligence philosophique devrait pareillement contribuer à une juste liberté de l’histoire. Certes, Aristote et Thomas d’Aquin étaient limités par les connaissances techniques de leur temps, mais c’était secondaire et aurait dû rester secondaire : tout esprit peut s’ouvrir à l’immensité ! Il n’empêche : ils distinguaient ontologiquement l’être contingent et l’Être nécessaire, le relatif et l’Absolu. Ils ne les confondaient pas : les limites du monde n’étaient pas tant dans ses dimensions, connues ou inconnues, que dans son être. Après avoir bien réfléchi sur l’essai de Didier Le Fur, on se dit que le malheur est sans doute venu de ce que, cherchant à supprimer le concept divin, l’homme a transformé peu à peu le relatif en absolu et rien de pire ne pouvait arriver. Le totalitarisme moderne est là. Le relatif, c’est l’hommerie, la petitesse qui se fait grandeur, la tromperie qui se fait vérité. Le contingent se hisse au rang de l’impérieuse Nécessité ! L’histoire en pareil état devient morale, religion et dogme….Au service de la domination du moment. C’est, je crois, ce que Didier Le Fur a voulu faire comprendre. N’est-ce pas ?

Et ils mirent Dieu à la retraite, une brève histoire de l’histoire, Didier Le Fur, Passés/Composés, 233 p, 19 €.

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