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Dans la tourmente

Passer quelques heures en compagnie de la dernière servante de Marie-Antoinette, quoi de plus merveilleux ?

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Dans la tourmente

Si l’extraordinaire d’une vie se joue le temps de quelques semaines pour l’Histoire, il ne s’accomplit que si l’ordinaire est en soi porteur de ces promesses. Rosalie Lamorlière fait indéniablement partie de ces figures qui seraient injustement oubliées ou à qui il serait trop peu rendu justice, tant sa vie n’a retenu l’attention des historiens que pour le témoignage inestimable qu’elle a pu rendre des derniers mois et dernières heures vécues auprès de la Reine au sein de la Conciergerie.

Il était plus que temps de se pencher plus longuement sur cette femme dont on peut retrouver la trace et le nom sur une pierre tombale au Père Lachaise. Ce devoir de mémoire et de justice lui est rendu par Ludovic Miserole qui, après plus de neuf années de recherches à décortiquer registres, témoignages, lettres et écrits d’époque, nous présente une Rosalie terriblement attachante au sein d’un roman qu’il est difficile de lâcher.

Née au sein d’une famille picarde, aimante et nombreuse, orpheline trop tôt, Rosalie part à Paris très jeune gagner sa vie. Le hasard de rencontres la place à 25 ans à la Conciergerie, cet ancien palais de Justice et prison où en 1793, pendant 76 jours, Marie-Antoinette fut incarcérée, jugée et condamnée. Entraînée malgré elle dans le grand tourbillon de l’histoire, cette jeune fille du peuple put ainsi assister cette reine déchue jusqu’à ses derniers moments, faisant d’elle un témoin privilégié de ces heures sanglantes.

76 jours au service de Marie-Antoinette

Sordides et misérables, les conditions de détention de Marie-Antoinette furent adoucies par les délicates attentions de Rosalie et entre ces deux femmes, qui avaient à peine le droit de se parler, se noua une relation sincère empreinte de respect. Après six ans de service à la Conciergerie, Rosalie côtoiera de nombreux personnages historiques, puissants d’hier ou nouveaux élus d’une France qui se cherche. Elle resta cependant simple domestique, eût une fille de père inconnu dont elle dut se séparer à la naissance, et, souffrant d’une sciatique qui lui causait des douleurs insupportables, ne pouvant plus subvenir à ses besoins, elle finit dans une grande précarité. Par l’entremise d’amis bienveillants, elle bénéficia des faveurs de la Duchesse d’Angoulême qu’elle ne rencontra pourtant jamais, afin d’être prise en charge à l’Hospice des Incurables où elle mourut à plus de 80 ans.

Son corps fut enterré dans une fosse commune, mais sa fille lui rendit hommage en faisant graver une épitaphe en son honneur sur le caveau familial. Mêlant rigueur historique et personnages romanesques, Ludovic Miserole nous offre ici avec talent le premier tome d’une série en deux volets, qui redonne sa juste place à une femme extraordinaire dans l’ordinaire.

 

Ludovic Miserole, Rosalie Lamorlière – Dernière servante de Marie-Antoinette, Editions Phenix Noir, 2022, 482 p., 16,95€

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