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« Aujourd’hui le pape n’est plus facteur d’unité mais de division »

Maxence Hecquard étudie depuis des années la question de l’autorité dans l’Église. Ses recherches l’ont mené à une position très tranchée sur la légitimité des papes depuis Vatican II. Entretien avec Maxence Hecquard réalisé par Philippe Mesnard.

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« Aujourd’hui le pape n’est plus facteur d’unité mais de division »

Le pape François parle beaucoup aux médias, mais pas toujours dans les formes canoniques habituelles du magistère.

Certes tous les propos du pape ne sont pas couverts par le charisme de l’infaillibilité. Toutefois il n’existe pas de « formes canoniques » que le pape devrait respecter pour engager son infaillibilité. Le concile Vatican I est formel : le pape est infaillible lorsqu’il parle en tant que successeur de Pierre en matière de foi et de mœurs. Aucune forme spécifique n’est requise. Pie XII a rappelé que l’on peut trouver des définitions dogmatiques dans de simples lettres encycliques adressées aux évêques. La déclaration Fiducia supplicans du 18 décembre 2023 autorisant la bénédiction de couples homosexuels relève-t-elle de l’infaillibilité pontificale ? La question est technique. On arguera que le document n’émane pas du pape mais du dicastère pour la Doctrine de la Foi (ex-Saint Office). Or l’infaillibilité pontificale ne peut être déléguée. Qui niera pourtant que cette déclaration a été faite sur instruction formelle de François qui a reçu officiellement son signataire, le cardinal Fernandez, le matin même de la promulgation et qui a lui-même assumé explicitement cette déclaration le 14 janvier 2024 ? Donc François explique qu’il faut bénir le péché des habitants de Sodome et Gomorrhe dont « la clameur est montée jusqu’au ciel » et qui a déclenché le feu divin (Genèse, c. 19). Il s’agit bien d’une instruction en matière de mœurs de François en tant que successeur de Pierre.

Un catholique doit-il partager l’avis du pape sur tous les sujets ?

Bien sûr qu’en soi le catholique doit suivre le pape en toute chose, puisqu’il est le Vicaire du Christ, c’est-à-dire le Christ vivant parmi les hommes. L’infaillibilité pontificale est un grand mystère. Le problème est que, depuis Vatican II, les papes disent l’inverse de ce qu’ont dit les papes d’avant. Or le Christ, la vérité, l’Église, ne changent pas. D’où vient cette contradiction ? Mon enquête montre que la seule explication est que ces « papes » sont illégitimes. Ils sont hérétiques depuis Vatican II, car Vatican II est hérétique. Par conséquent ils ne jouissent pas du charisme de l’infaillibilité.

Les réactions épiscopales à Fiducia supplicans posent clairement le problème de l’autorité dans l’Église.

Rappelons que cette déclaration est la réponse officielle à l’un des Dubia présentés à François par cinq cardinaux le 10 juillet 2023. Une première salve de Dubia avait été envoyée dès 2016. La levée de boucliers épiscopaux qui a suivi Fidei Supplicans est inédite. Le cardinal Sarah dénonce « une hérésie qui mine gravement l’Église ». C’est nouveau. Même Dignitatis Humanae à Vatican II n’avait pas attiré de tels anathèmes. Il est vrai que l’hérésie de la liberté religieuse est plus subtile que celle de bénir le péché contre nature. L’Église est profondément ébranlée. Tous les observateurs le reconnaissent. On ne peut plus faire l’économie d’une réflexion théologique sur la légitimité de ces prélats. C’est ce que tente mon ouvrage à la lumière des théologiens et canonistes classiques.

Il semble que l’Église catholique, sous le pontificat de François, soit arrivée à un curieux carrefour où la démocratie synodale se retourne contre son promoteur.

Paradoxalement ce pape très autoritaire prône une Église « synodale », c’est-à-dire où la vérité n’est plus décrétée par la Chaire de Pierre, mais surgit du peuple chrétien lui-même. La crise que nous vivons vient de loin. Mon livre explique que le conciliarisme de Marsile de Padoue au XIVe siècle est à l’origine de toutes les hérésies depuis la Renaissance. Dire le concile général supérieur au pape est une hérésie maintes fois condamnée. Le protestantisme et le gallicanisme reprendront ces erreurs que la proclamation du dogme de l’infaillibilité pontificale en 1870 sembla définitivement éradiquer. Las, elles ont perduré grâce au mouvement moderniste et à la démocratie chrétienne et ont pénétré la doctrine catholique à Vatican II par les concepts de sacerdoce des fidèles et de collégialité dont « l’Église synodale » de François est l’héritière. La bronca actuelle des évêques n’était pas prévue par François et ne s’inscrit pas dans la démarche synodale qu’il a lancée en 2021. Elle illustre toutefois la perte d’autorité de la fonction pontificale, directement liée aux révolutions dogmatiques scandaleuses issues de Vatican II.

François a déclaré que Fiducia supplicans ne s’appliquerait pas partout, comme si la vérité dépendait des cultures qui la reçoivent. Peut-on dire qu’il existe désormais “des” églises catholiques ?

Le pas en arrière de François laissant l’application de Fiducia supplicans aux évêques relève de la feinte tactique et du damage control. Saint Cyprien de Carthage (~200-258) explique que l’Église est essentiellement une. Saint Thomas d’Aquin précise que cette unité vient du pape qui, seul, fixe le Credo. Aujourd’hui le pape n’est plus facteur d’unité mais de division. L’unité, et donc l’universalité, de l’Église sont en danger. « [Ma lance,] frappe le pasteur et que les brebis soient dispersées ! », avait prophétisé Zacharie (13, 7). Le Christ applique cette parole à sa propre mort (Mt 26, 31). L’Église revit la passion du Christ. Le pape meurt et les fidèles sont dispersés. Vatican II avait profondément réduit la souveraineté des évêques dans leur diocèse en transférant les décisions aux conférences épiscopales, censées représenter le peuple chrétien à l’instar des parlements laïcs. Le désordre actuel mène les fidèles désorientés à suivre tel ou tel évêque dont ils partagent les vues. C’est le retour des églises particulières indépendamment des frontières diocésaines, voire de tout mandat romain dans le cas des évêques traditionalistes. Mon livre aborde la question du fondement de la juridiction des évêques traditionalistes. Question fort peu étudiée et sur laquelle n’existe aucun consensus, mais question essentielle puisque, face à la défaillance des pontifes de Vatican II, l’autorité repose désormais dans les mains des évêques fidèles, c’est-à-dire des évêques validement ordonnés et qui conservent la foi catholique intégrale. Mais ces évêques sont eux-mêmes divisés et ne se parlent pas. C’est « l’abomination de la désolation dans le lieu saint », prédite par le prophète Daniel.

Si la doctrine, le magistère, se trouvent relativisés de fait par le pape en fonction, quelle est l’autorité du magistère et du pape ?

Bien évidemment la pénétration de l’idéologie démocratique dans la doctrine catholique amoindrit l’autorité pontificale. On ne parle plus de « monarchie pontificale » comme le faisait Dom Guéranger au XIXe siècle. Mais soulignons qu’aucun pape de Vatican II n’a remis en cause l’infaillibilité pontificale. Cette doctrine sert trop le progrès de leurs idées nouvelles. Ainsi, même si les définitions dogmatiques ne sont plus à la mode dans une Église qui prône essentiellement la liberté, on ne peut en conclure que les papes aient renoncé à la moindre de leurs prérogatives. La gestion sévère de François, par exemple au travers de l’interdiction de la messe traditionnelle qu’avait autorisée Benoît XVI, montre bien qu’il ne veut voir qu’une seule tête. La bonhomie de François est réservée aux non-catholiques et aux pécheurs publics, mais ne concerne guère les fidèles réguliers. Au regard de la théologie catholique, la problématique aujourd’hui de l’autorité dans l’Église est malheureusement strictement binaire : soit on considère que, malgré tous leurs forfaits, les papes de Vatican II sont légitimes, il faut alors embrasser leur religion nouvelle, c’est-à-dire la confusion œcuménique des croyances en une fraternité universelle et démocratique, soit on juge que cette religion nouvelle n’est plus le catholicisme de nos pères, il faut alors les reconnaître pour ce qu’ils sont : des hérétiques. Or tous les théologiens et les canonistes déclarent que les hérétiques n’ont aucune autorité dans l’Église, parce qu’ils l’ont quittée. On doit alors conclure que les papes de Vatican II ne sont pas légitimes.

Cette position ne conduit-elle pas à une impasse ? Quelle espérance reste-t-il ?

Le soir du vendredi saint, l’Église naissante semblait bien dans l’impasse. Dieu dirige l’Église aujourd’hui comme hier. Il suffit de Lui faire confiance et de Le suivre. Pour notre consolation, la Sainte Écriture annonce clairement cette « défaite des saints » et la « grande apostasie ». Mon livre reprend ces textes et les commentaires des pères et des exégètes médiévaux qui détaillent ces terribles épreuves. La victoire du Christ est certaine. Il nous est seulement demandé de « tenir à ce que nous avons » (2 Thessaloniciens 2, 7), c’est-à-dire de tenir à la tradition.

 

Maxence Hecquard, La crise de l’autorité dans l’Église, les papes de Vatican II sont-ils légitimes ? La Nouvelle Librairie, novembre 2023, 30 €.

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