Civilisation
Vauban pour toujours
1692, le duc de Savoie franchit le col de Vars, emporte Embrun, puis Gap. Louis XIV demande à Vauban de fortifier le Queyras.
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Si Jean Santeuil paraît chez Gallimard, en 1952, c’est grâce à un jeune professeur agrégé qui a (littéralement) fouillé dans les papiers de Proust, s’est rendu compte qu’il tenait dans ses mains un roman inédit et l’a patiemment inventé, comme un trésor. L’anecdote vaut pour ce qu’elle prouve : Bernard de Fallois (car c’était lui) est un lecteur génial de Proust, un lecteur qui perçoit l’architecture, comprend l’inspiration, goûte l’écriture et voit se déployer devant lui, à plat et étincelantes, toute la Recherche et toute la personnalité de Proust. Le plaisir de lire aujourd’hui ses sept conférences sur l’auteur de la Recherche, son roman, sa méthode, est à la mesure de leur apparente simplicité : le texte est limpide, le ton rassurant, l’érudition soigneusement gommée (mais sous-tendant chaque mot) et chaque causerie, comme Fallois les appelle, est une clé pour comprendre l’œuvre en même temps qu’une manière ironique de tenir à distance des commentateurs trop savants, trop sérieux, trop appliqués, le nez au ras du texte ou perdus dans la jungle de la correspondance du Maître ou encore si acharnés à élucider le moindre mot que la matière proustienne (psychologie, humour, précision et réflexion incessante sur ce que sont le temps et ses dimensions intérieures) en est irrémédiablement détruite. Pour qui s’est risqué à lire la Recherche, ces conférences ravivent les plaisirs de la lecture et y ajoutent leurs propres charmes, comme cette très honnête “défense” de Proust qui fait litière de sa supposée paresse, Fallois versant Jean Santeuil au dossier : si inachevé qu’il soit, il a bien fallu l’écrire, ce roman, et des années durant ! Pour qui n’a pas encore plongé dans l’océan de La Recherche, ce livre en est la meilleure introduction.