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Jeunesse aux cœurs ardents, un film initiatique

La dernière œuvre de Cheyenne-Marie Carron est comme toujours attachante et ne nous laisse pas indemnes, toujours avec ce mélange d’âpreté et de bienveillance extrêmes pour des héros qui ne demandent qu’à mûrir.

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Jeunesse aux cœurs ardents, un film initiatique

Le film traite de la rencontre d’un jeune garçon, David, désenchanté et à la dérive, avec Henri un vieux briscard, ancien de la Légion étrangère, qui n’a pas abandonné le goût de vivre, ni bien sûr le sens de l’honneur, ce qui lui permet de réagir en homme à une attaque quand même crapuleuse de la bande que fréquente David par désœuvrement, et de tenir bon. Le film nous plonge directement dans la confrontation de deux mondes, celui d’une jeunesse aujourd’hui en déshérence, totalement désaccordée, abandonnée à son mal de vivre et un autre monde, peu connu, qui a gardé ses traditions, ses vertus, le courage, le sens de l’honneur, et un véritable sens de la fraternité. Bref, un monde vieux avant l’âge et un monde très ancien, qui a paradoxalement gardé sa fraîcheur.

Sur cette inappétence de la jeunesse d’aujourd’hui à vivre notre époque, on pourrait aussi songer à la confession d’un enfant du siècle d’Alfred de Musset ou à Rolla, comme quoi ce thème n’est en rien démodé, et ressurgit mais avec quelle force aujourd’hui !

Mais Cheyenne-Marie Carron ne se contente pas d’observer et de filmer avec une sèche complaisance le malaise des jeunes en déshérence, comme le font trop de cinéastes, et de s’arrêter là. Non, elle veut aussi nous emmener dans une quête fondatrice, précisément refondatrice. Il serait donc dommage de passer à coté, de ne pas prêter patiemment attention à son histoire, et ne pas creuser, avec elle, ce qui est quand même d’une actualité plus que brûlante. Car comme la fameuse pièce de Pirandello, Six personnages en quête d’honneur, ici presque tous les personnages sont bien en quête d’un autre rôle qu’on leur a assigné ou auquel ils se sont résignés.

Bref, cette rencontre va transformer David le jeune héros, lui permettre de se reconstruire, de prendre enfin une distance salutaire avec ses parents trop bobos, plus vrais que nature comme aussi avec un professeur, lui aussi trop lisse, très loin de ce qu’on attend d’un vrai professeur, de nous ouvrir un monde et non de le ratiociner. Nous assistons donc un peu médusés à la transformation de David, pour redonner sens à sa vie Ce film peut donc d’abord être vu essentiellement comme une œuvre d’initiation pour notre époque, faisant écho aux fameux Bildungsromans des écrivains allemands ou roman (ici film) d’apprentissage.

Force du film

Maintenant Cheyenne-Marie Carron n’est jamais plus à l’aise que quand elle fait éclater des psychodrames, à la limite de happenings entre ses personnages, qui témoignent de leurs blessures intimes ; mais aussi de leur volonté d’en sortir, de toucher terre. À remarquer aussi de très belles séquences oniriques et poétiques : ces jeunes à la limite de la délinquance grave, cherchant dans des combats une fraternité qui leur est refusée par une société hyper-individualiste. Déjà, dans un de ses films précédents, Patries, on avait déjà eu droit à une scène saisissante : deux jeunes garçons, l’un africain, l’autre issu de la France profonde, périphérique, mais tous les deux exilés dans cette banlieue, couraient fraternellement ensemble dans un stade, eux aussi à la recherche des sources perdues de leur enfance, de leur identité originelle, leur désarroi gravé sur leur visage.

Certains pourront trouver naïf que la seule issue où puisse se raccrocher David en 2017, soit de trouver le monde de la Légion, celui d’Henri, qui a gardé intactes ses valeurs, et finalement choisir de s’y retremper. À cette objection on peut faire deux remarques.

Premièrement devons-nous nous voiler la face ? À ces jeunes tentés par la violence parfois sans retour – et pour d’autres aujourd’hui, c’est bien le Djihad qui les fascine – quelle autre perspective concrète peut, doit-on leur offrir, sinon un engagement personnel, qui les sorte de cette nasse, où ils sont englués au sens propre et figuré ? Qui ne connaît pas le dévouement d’anciens militaires s’engageant dans les banlieues pour les jeunes en difficultés ? Ensuite, pour ceux qui y verraient un éloge un peu simpliste d’une institution militaire, faisons-leur observer le foisonnement de scènes, véritables happenings, permettant à chacun de trouver une autre vision sur leur histoire et notre histoire, le dernier mot étant laissé à une fraternité secrète, celle de ceux qui se sont affrontés du regard, comme dans cette scène incroyable entre jeunes issus de l’émigration s’opposant à propos de la colonisation. De même dans une autre scène opposant Henri au père de David sur le même sujet. La vérité n’étant jamais simple, surtout sur une période aussi douloureuse, la vérité du cinéma est bien dans ces échanges de regards sur le visage de l’autre, et là Cheyenne-Marie Carron, on peut aussi lui en être reconnaissant, a pris tous les risques pour nous aider à voir plus loin, que les idéologies réductrices, ce qui est bien le rôle du cinéma.

Une leçon

Mais nous aussi allons plus loin ; Nous le ressentons tous confusément :

L’homme n’a jamais eu un tel sentiment d’autosatisfaction : il est comme un enfant irresponsable laissé à lui-même qui a enfin le droit de tout faire, mais qui, le soir venu, ne sait que faire de sa liberté et n’éprouve plus que peur et angoisse. (1)

C’est cette peur et cette angoisse que distille notre trop fameuse société de consommation, ayant effacé de fait tous les repères, que Cheyenne-Marie Carron nous rend palpables ; saluons au passage la performance et le jeu sensible de son interprète principal, Arnaud Jouan, qui confesse avoir mis du temps pour se mettre dans la peau de son personnage, « ses passions, ses chagrins, ses problèmes familiaux et s’y être investi totalement ». Comme d’ailleurs le jeu d’André Thieblemont qui donne une grande densité à son personnage d’ancien légionnaire, donnant à David l’occasion de découvrir ce monde, qu’il ne peut soupçonner, de fidélité, d’honneur et de caractère, qui permet enfin de respirer et de vivre.

Par ailleurs nous assistons à une scène familiale où le père de David et un de ses amis se sont littéralement barbouillés le visage de rouge à lèvres, prétendant montrer de cette manière leur solidarité avec les femmes persécutées. sous les yeux effarés du fils, qui n’en peut plus. Ses protestations douloureuses contre cette mascarade vont finalement convaincre sa mère et son amie. Cela peut rappeler un très ancien film La fureur de vivre, avec James Dean, où le jeune héros, humilié par le spectacle d’un père démissionnaire de son rôle, déjà otage de la société maternante de consommation, se jetait à corps perdu dans une folle course automobile au bord du ravin. Ici le remède que trouvent ces jeunes, est le recours à la délinquance et aux drogues. L’inconsistance des pères, noyés dans le verbalisme, se réfractant dans les fils, ne prépare-elle pas une génération sans liens, n’ayant rien où se raccrocher ? (2)

Remarquons que les femmes, du moins la génération des mères, s’en sortent mieux que les hommes, le bon sens ne les ayant pas encore totalement désertées ; surtout elles savent réagir à la quête sincère de David, et finalement convaincre son père de laisser enfin la voie libre à son fils.

Peut-être manque-t-il à David, à ce jour, la présence lumineuse d’une compagne, comme dans un autre film de Cheyenne, La morsure des Dieux, qui puisse baliser et féconder sa route, pour l’aider à résister aux miasmes de l’époque. La seule jeune fille du groupe, reste un peu en retrait. Mais David ne semble pas encore prêt à cette autre aventure initiatique, elle aussi mise à mal par les temps qui courent.

Jeunesse aux cœurs ardents est donc bien, – du moins à mon sens – d’abord un film d’initiation et d’apprentissage dont on peut aussi dire après l’avoir vu : maintenant, « une nouvelle histoire commence.»

Henri Peter

(1) Laszlo Földény Dostoïevski lit Hegel en Sibérie et fond en larme p.49 ( Actes sud).

(2) N’est-ce pas aussi ce qui a été prédit ou vu par Dostoïevski dans son roman les Possédés ?

Un film à aller voir en famille. Il sera en salle à partir du 14 mars 2018. Il faut aller chercher ICI où le film est distribué. Cheyenne-Marie Carron n’a pas à sa disposition les services et les réseaux officiels. Comme pour tous ses films, L’Apôtre (2013), Patries (2015), La chute des hommes (2016), La morsure des dieux (2017) – rien qui soit dans la bien-pensance – elle doit se battre sans moyen autre que son courage, sans soutien autre que ses amis. Nous sommes de ses amis. Des DVD sont en pré-commande sur le site internet.

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