Connaissez-vous la « cour des comptes de l’égalité » ? Vous identifiez-vous à « un nous inclusif et solidaire » ? Vous êtes-vous déjà rendu coupable d’un « délit de harcèlement racial » ? Non, cette novlangue n’est pas tirée d’un roman de George Orwell ! Ce sont les élucubrations sorties tout droit des cerveaux tortueux d’étranges « groupes de travail » chargés par le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, de rédiger un rapport afin de nourrir sa réflexion sur la refonte de la politique d’intégration. Ledit rapport a été publié sur le site de Matignon. Il préconise rien moins que la suppression de la loi
interdisant le port du voile à l’école, qu’une « remise à plat » de l’histoire de France pour mieux parler de l’esclavage, de la traite négrière ou des Roms, que la possibilité d’apprendre une langue africaine dès le collège et, cerise sur le gâteau, que la France « assume la dimension arabe-orientale de son identité »… Le tout pour nous soumettre à un « changement de paradigme » pour une meilleure intégration – même si le terme, jugé offensant, est récusé – des populations immigrées.
Dans le meilleur des mondes imaginé par ces « experts » stipendiés par le chef du gouvernement, les enfants, dès l’école maternelle, participeraient à « des ateliers-débats sur des sujets tel que l’altérité, l’identité, les questions de genre, la religion », tandis que de « nouvelles rues et places de villes et de villages » seraient renommées en « écho avec l’histoire des migrations ». N’en jetez plus !
Rendues publiques, ces préconisations, teintées d’une idéologie égalitariste et antidiscriminatoire caricaturale, ont suscité des émois jusqu’au sein de la majorité. On connaît la manie de la gauche de vouloir changer les hommes et la société. Mais trop, c’est trop. « Ce n’est pas du tout la position du gouvernement », a tenu à clarifier François Hollande. Pour Jean-Marc Ayrault, c’est tout le bénéfice escompté de sa contre-offensive sur la fiscalité, qu’il a promis de « remettre à plat », qui semble balayé. Ses adversaires recommencent à rêver de son rapide remplacement et ses conseillers imaginent les moyens de le sortir de ce mauvais pas.
Mais le vrai scandale, dans ce nouvel épisode de cacophonie gouvernementale, est dans l’influence considérable de ces milieux associatifs et militants qui, rémunérés par la collectivité, voudraient que la France ne soit plus la France. Charles Consigny, dans un article du Point, l’écrit remarquablement : ils la préfèrent « sans son histoire, sans sa langue, sans ses rues, sans sa culture et sans son peuple ». Ils la rêvent multiculturelle et morcelée. Une France où les « hommes mâles, blancs et hétérosexuels » n’auraient plus leur place. C’est précisément à ces « petits Blancs » des quartiers pauvres de la République qu’Aymeric Patricot a consacré une enquête qui fera date (Les Petits Blancs, un voyage dans la France d’en bas, éditions Plein Jour, 161 pages, 17 euros). Misère financière, misère sociale, misère familiale sont le quotidien de ces classes moyennes paupérisées qui subissent la double peine d’être méprisés par les « élites » et de se sentir parfois étrangères dans leur propre pays. Aux pompeux professeurs de morale antiraciste, emplis des intolérances qu’ils dénoncent chez les autres, ce « voyage dans la France d’en bas » promet une nouvelle société, ouverte à toutes les divisions.
Le comte de Paris écrit dans Le Figaro du 18 décembre : « Il est vrai qu’il aura toujours été plus facile (…) d’effacer à tout jamais la mémoire des racines originelles de quelque peuple que ce soit. Le tout, sous prétexte de fournir une fausse nouvelle joie de vivre aux esclaves en devenir, contraints de choisir entre la soumission à la dictature du politiquement correct et l’exclusion absolue. Si la France, elle, n’a jamais succombé aux coups, parfois mortels, qui lui ont été portés, c’est qu’elle a encore une âme ». Belle leçon d’espérance à l’heure où le gouvernement entend revenir sur ce qui fonde le droit de la famille. La loi en cours d’élaboration reflétera les folles théories à l’origine du mariage dit « pour tous » dont le pouvoir socialiste a fait la plus emblématique de ses réformes. Mais c’est ne pas tenir compte du « réveil des familles de France » auquel Politique magazine consacre son dossier de Noël. Oui, la France a encore une âme !