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Eh bien ! Payez maintenant

Les milliards volent en escadrille, en centaines pressées, ici pour armer la France selon les ordres des États-Unis, là pour couvrir la France d’éoliennes pour complaire aux amis de Macron. Ils prennent leur envol en sortant de nos poches. On ne les reverra plus.

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Eh bien ! Payez maintenant

Le Premier ministre avait promis que pour le bal du 14 juillet il chanterait au pays le refrain de la rigueur budgétaire. Jusqu’à présent il a toujours affiché la volonté d’arriver à une économie de 40 milliards d’euros. Mais le budget de 2025 risquant un nouveau dérapage, l’effort demandé aux Français pourrait être encore plus important que cela n’était envisagé. Jusqu’à présent, les pistes évoquées dans des « fuites » savamment orchestrées concernaient la lutte contre les niches fiscales que constituent les « aides à la personne » ou l’abattement de 10 % sur les retraites. On envisagerait aussi de diminuer les allocations versées par l’État aux collectivités locales, charge à elles de diminuer leurs dépenses ou de trouver comment les financer. Comme l’a encore promis le 22 juin la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin : « Nous n’augmenterons pas les dépenses de l’État ». Force est de constater que les « éléments de langage » ont changé ; elle ne parle plus de ne pas augmenter les impôts.

Les arbitrages nécessaires

Le jour même où cette promesse était réitérée, un autre ministre de notre gouvernement participait à la réunion de l’OTAN qui décidait de revoir la contribution de chaque État membre à l’effort commun de défense. Jusqu’à présent, les accords de 2014 reconduits en 2021 avaient pour but de porter le budget de la défense à 2 % du PIB. Compte tenu de l’ultimatum adressé par le président Trump à ses alliés, l’effort commun devra être porté à 5 % du PIB (3,5 % pour les dépenses militaires stricto sensu et 1,5 % pour les dépenses de « sécurité au sens large »). Pour la France, cela signifie que le budget de la Défense devra plus que tripler, passant d’environ 50 milliards à plus de 160. Ajoutons à cela que le budget actuel n’inclut pas l’aide à l’Ukraine. Si donc le budget de la défense doit augmenter dans ces proportions et que la dépense globale de l’État ne doit pas augmenter, il va falloir que les autres ministères trouvent comment faire des économies substantielles. Et cela risque de ne pas être simple. Car d’autres augmentations sont déjà actées ou en voie de l’être. Par exemple, le plan pluriannuel de l’énergie a pour ambition de « multiplier par deux les éoliennes terrestres, par cinquante les éoliennes en mer et par quatre les panneaux solaires pour un coût estimé à 150 milliards sur dix ans. À ceci, il convient d’ajouter 130 milliards de coûts de raccordement »1. Sans compter que l’État s’est engagé à racheter l’électricité ainsi produite par entreprises qui exploitent ces systèmes dits d’énergie renouvelable à un prix qui dépasse très largement le coût moyen de l’électricité en Europe. De plus, ces calculs sont établis « toutes choses égales par ailleurs » comme disent les économistes, c’est-à-dire, en l’occurrence en considérant que les coûts des équipements nécessaires (panneaux solaires produits en Chine, armement majoritairement acheté aux États-Unis) seront maîtrisés. Pour clore ce chapitre des arbitrages nécessaires, signalons que les pouvoirs publics n’ont pas l’intention de revenir sur la gratuité de l’avortement ni de rendre payants l’euthanasie et le suicide assisté. Il y a aussi fort à parier que cet arbitrage n’impactera pas non plus beaucoup les dépenses liées à l’accueil des migrants, qu’ils soient ou non en situation régulière ; or, d’après la Cour des comptes, ceux en situation irrégulière coûteraient un peu moins de 2 milliards par an.

Les incertitudes du commerce international

Les bombardements israéliens et américains risquent par ailleurs de provoquer des réactions en chaîne qu’il est difficile d’appréhender correctement. La première concerne les exportations de pétrole iranien dans le monde, qui s’élèvent jusqu’à présent à plus d’un million de barils par jour… essentiellement à destination de la Chine. Par mesure de rétorsion, l’Iran menace aussi de bloquer le détroit d’Ormuz par lequel transite 20 % du trafic mondial de pétrole ainsi qu’une part importante du trafic de gaz naturel liquéfié (notamment en provenance du Qatar). Cela aurait pour effet premier de déstabiliser l’ensemble des pays du Golfe. Il pourrait dès lors en résulter une envolée des prix du pétrole qui ne manquerait pas d’avoir des effets négatifs sur l’économie française. Sans pousser très loin l’analyse, un blocage du détroit d’Ormuz aurait pour conséquence directe, outre de peser sur le trafic du pétrole, d’accroître les redevances des assurances maritimes et d’augmenter sensiblement la longueur (et donc le coût) des trajets maritimes pour toutes les marchandises circulant entre l’Asie et l’Europe. À plus long terme, cette crise pourrait déboucher sur de nouveaux accords entre les États-Unis, Israël et les pays de la péninsule arabique dans la mesure où, à l’échelle mondiale, le monde chiite se trouverait très handicapé par rapport aux sunnites. Et, à ce stade, l’on voit mal comment l’Europe en général et la France en particulier pourraient en profiter.

Les conséquences de la gabegie antérieure

Depuis de nombreuses années, la Cour des comptes dénonce inlassablement la mauvaise gestion des Pouvoirs publics. Or, cette mauvaise gestion a eu pour conséquence de faire exploser le montant de la dette publique française dont la charge annuelle d’intérêts s’élève déjà à plus de 50 milliards et pourrait fortement déraper si les agences de notation prenaient en considération la difficulté des Français à supporter une nouvelle augmentation des « contributions » publiques – puisqu’il n’y aura pas d’impôts nouveaux ! Ainsi, la Cour des comptes a dénoncé la mauvaise allocation des fonds de 10 milliards du plan de relance de 2021… lesquels viennent s’ajouter aux 5 milliards qui correspondent aux commandes de masques et équipements achetés pour faire face à la crise de la Covid-19, inutilisés et désormais totalement inutilisables. La Cour des comptes émet d’ailleurs l’hypothèse que tous ces matériels avaient été payés à un prix déraisonnable. Quant à la ministre des Comptes publics, dans la même déclaration du 22 juin, elle a avoué que la dissolution de l’Assemblée Nationale avait coûté très cher au peuple français : « La censure a coûté 12 milliards d’euros qu’on a jetés par les fenêtres, parce qu’on a perdu de la croissance, qu’on n’a pas eu le budget, que les agriculteurs, les entrepreneurs, tout le monde était dans la tétanie et dans cette espèce de peur du chaos qui était réelle ». On comprend pourquoi, deux jours avant, notre ancienne ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra, avait eu peur d’accepter le poste de présidente du Comité national olympique (poste jusque-là essentiellement honorifique et bénévole) sans être assurée de percevoir une petite indemnité de 9 000 euros par mois ; une goutte d’eau dans notre océans de dépenses.

Eh bien ! Payez maintenant

Inutile de poursuivre ce qui pourrait être considéré comme un catalogue à la Prévert. Le Gouvernement doit trouver 40 milliards d’économie alors qu’il sait déjà que ses dépenses vont augmenter de beaucoup plus et alors que la Cour des comptes lui rappelle régulièrement qu’il a tendance à jeter l’argent – des contribuables – par la fenêtre. Monsieur Bayrou l’avait promis, avant le 14 juillet (mais après le départ en vacances des Français) il dirait la vérité qui permet d’agir. Chacun pouvait donc s’attendre à un plan d’action pour relancer l’économie, associé à une liste de coupes dans les dépenses inutiles, voire nocives. Un plan qui ne pèse pas trop sur les finances de la population car cela pourrait avoir des effets néfastes sur la croissance. Hélas, un examen même rapide de la situation actuelle laisse penser qu’il ne pourra pas faire autrement que de chanter : « Vous consommiez, j’en suis fort aise. Eh bien ! Payez maintenant ».

 

Illustration : Éric Lombard, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics, se mettent d’accord pour saigner les Français.

1   JDD, 22 juin 2025.

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