Civilisation
Vauban pour toujours
1692, le duc de Savoie franchit le col de Vars, emporte Embrun, puis Gap. Louis XIV demande à Vauban de fortifier le Queyras.
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A ceux qui disent que le mal n’existe pas, que tout le monde est victime de son milieu ou de son passé, je conseille de lire L’Homme de Londres de Georges Simenon. Georges Simenon ? Cet éternel auteur de romans de gare ? Ce misanthrope au style d’écriture aussi glacial que la lame de rasoir ? Ce vieux réac ? Les imbéciles pensent ce qu’ils veulent. Pour ma part, je suis concerné par la vision aiguë du mal qui se dégage de ce roman paru en 1976.
Pour Simenon, le mal est contagieux. Il se propage comme un virus. Maloin est un homme ordinaire, père de famille et aiguilleur de son état. Il mène une vie réglée, simple, rythmée par l’habitude. Or, une nuit de service, il devient le témoin d’un meurtre. Profitant de l’occasion qui se présente, il vole 540 000 F appartenant à l’homme tué et qu’il cache dans une armoire sur son lieu de travail. La tentation était trop grande pour lui. Maloin « frissonnait à l’idée d’être riche. ». Il ne réfléchit pas à ce qu’il fait. Le crime est une pulsion qui ne demande que d’être libérée et assouvie. Cependant le meurtrier est à ses trousses, le soupçonnant d’avoir mis la main sur l’argent. Maloin réussit à l’enfermer dans sa cabane. Lorsque le meurtrier l’attaque par derrière, il se défend. L’instinct de survie prenant le dessus sur sa peur, il finit par tuer son agresseur. Dans l’acte de Maloin, rien n’était prémédité alors que le meurtrier avait planifié son coup pour voler l’argent.
En l’espace de quelques jours, un homme comme un autre, ni particulièrement malheureux ni particulièrement heureux, s’est transformé en voleur, puis en assassin. La cupidité, somnolente en nous tous, s’était éveillée en lui. « Il sentait bien qu’il n’était plus un homme comme les autres. Il avait franchi une frontière inconnue, sans pouvoir dire à quel moment cela s’était passé. » C’est cette frontière qui le sépare désormais des hommes.
Plus tard, Maloin avoue tout à la police afin de soulager sa conscience. Il assume ses actes, dit la vérité et accepte le verdict avec fatalité. Quand on a fait le mal, on doit payer. Mais rien ne lui rendra son humanité. Le crime et l’aveu l’ont rendu calme. Beaucoup trop calme, et docile. Aussi docile qu’une mécanique d’horloge.
Écrit dans un style descriptif et dépourvu d’explications psychologiques et sociales, l’Homme de Londres n’est pas qu’un objet de culture populaire, n’en déplaise aux anti-élitistes. Les universitaires « engagés », ceux même qui voient tout par le filtre de la politique, de la sociologie et de la psychologie, ne peuvent que considérer tout geste littéraire comme une chose monstrueuse car gratuite, généreuse et inutile. Leur haine du mystère est telle qu’ils doivent constamment se rassurer. Expliquer et se rassurer. Or le roman de Simenon ne rassure pas. C’est avant tout une profonde réflexion sur la nature du mal.