Adieu Union pour un mouvement populaire, défunte UMP. Place donc aux « Républicains ». Voulu par Nicolas Sarkozy, ce changement de dénomination devrait être entériné par les militants lors du congrès de Paris, le 30 mai prochain. Les motivations de l’ancien président de la République sont connues. Changer l’image d’un parti endetté traînant derrière lui des affaires toujours en cours.
Incarner une forme de nouveauté en faisant passer auprès des Français l’idée que lui-même a changé. S’affranchir des règles statutaires actuelles qui prévoient des primaires ouvertes pour désigner le candidat à l’élection présidentielle de 2017. Rassembler les différentes sensibilités de la future ex-UMP.
Malgré les récriminations des juppéistes, l’appellation a en effet l’avantage d’être suffisamment vague pour satisfaire le plus grand nombre à droite. Des libéraux aux régaliens, en passant par les laïcs, chacun trouvera son compte dans cette référence à « la République », devenue l’alpha et l’oméga de la vie politique française. Plus républicain que moi, tu meurs !
Ainsi, les cris d’orfraie de la gauche, qui accuse la droite de s’approprier un mot censé appartenir – paraît-il – à tous, paraissent bien dérisoires. Manuel Valls, qui a fait de la défense des « valeurs de la République » son cheval de bataille et se pense comme le plus républicain des républicains, se trouve pris à son propre piège. Verra-t-on l’actuel Premier ministre, lors de futures campagnes électorales, invoquer les « valeurs républicaines » face au représentant des… « Républicains » ?
Magie de la sémantique et de la communication ! Les centristes, quant à eux, pourront interpréter ce brevet auto-attribué de républicanisme comme l’établissement d’une solide barrière avec le Front national… qui, pourtant, se dit, lui aussi, plus « républicain » que tous les autres. Renommer le principal parti d’opposition est d’ailleurs la meilleure façon de bipolariser à nouveau le débat public tout en rassurant les militants, las d’être associés à « l’UMPS » par Marine Le Pen.
Si l’on suit cette logique, Nicolas Sarkozy, qui cache mal un tropisme américain prononcé, souhaiterait sans doute que le Parti socialiste change son nom – il en est question – en « Parti démocrate ». Or, on sait qu’aux États-Unis, les démocrates sont partisans du pouvoir renforcé de Washington tandis que leurs homologues républicains défendent la souveraineté des états américains face au pouvoir central. Ironie de la situation : un parti européiste – et donc fédéraliste – comme l’UMP, prenant, par goût des États-Unis, le nom du parti américain anti-fédéral !
Mais la France n’est pas l’Amérique qui sait défendre ses intérêts. Obnubilés par des questions de communication, nos dirigeants ont depuis longtemps abandonné des pans entiers de souveraineté à l’Europe, technocratique et supranationale. De réunions en réunions, cette Europe montre chaque jour son incapacité à résoudre les problèmes qui lui sont posés – peut-il en être autrement à vingt-sept pays aux intérêts de plus en plus divergents ?
Or, les drames de l’immigration clandestine viennent régulièrement rappeler que l’urgence politique est de retrouver des moyens d’action. Car, comme le montre le dossier de Politique magazine, ces abandons de souveraineté n’ont rien d’une fatalité. Il y faudrait une volonté politique indépendante. Malheureusement, dans notre République, qui a cessé d’être la « chose publique », on la cherche encore…