Comme le complément du titre de l’ouvrage l’indique, ce livre est donné par l’éditeur comme un testament spirituel. Testament, il l’est à double titre : il paraît, d’une part, de la volonté du pape Benoît XVI lui-même, de façon posthume et, d’autre part et davantage, il l’est par la remarquable synthèse de la pensée du pape allemand.
L’ouvrage est une collection d’articles ou d’allocutions, généralement courts, parus ou prononcées de façon indépendante et, comme tel, sans lien littéraire les uns avec les autres. Cependant, il ressort de cet assemblage non seulement une ligne logique, ou plutôt théologique, mais surtout une profonde dynamique synthétique de ce qui animait le défunt pape.
À le lire, presque d’une traite, on ne manque pas d’être frappé par la capacité inouïe de condenser en quelques phrases, quelques paragraphes articulés avec science, des éléments théologiques parfois difficiles ; de dire des choses complexes simplement et presque sans effort, semble-t-il. Benoît XVI y apparaît comme un docteur de la foi et comme celui qui confirme ses frères dans cette même foi, ce qui est le rôle du pasteur suprême dans l’Église catholique.
Force, humilité, douceur
Sous le titre « Ce qu’est le christianisme », Benoît XVI présente donc une série de ses interventions, sans lien les unes avec le autres, nous l’avons dit, mais ordonnées ici d’une façon qui se veut logique et progressive. Ainsi, après un premier chapitre traitant du concept de religion, un deuxième traite « de la nature et du devenir du monothéisme ». À ce propos sont abordées la question de l’islam, et celle de la liturgie. Un troisième chapitre présente un texte – sur lequel on a polémiqué, évidemment – abordant le « rapport entre juifs et chrétiens ». Les quatrième et cinquième chapitres traitent plus spécifiquement de théologie. Le quatrième, dogmatique, offre ainsi, entre autres choses, une profonde et dense réflexion sur l’Eucharistie et le sacerdoce – pour ce dernier point, il s’agit du texte établi avec le cardinal Sarah ; texte ayant donné lieu à polémique aussi. Le cinquième – particulièrement pointu, il me semble –, à l’occasion d’un propos sur les abus sexuels dans l’Église, permet surtout de faire un point sur la nature de la théologie morale articulée à une vie de foi.
Ce qui n’aurait pu apparaître que comme une juxtaposition de textes se donne à lire comme une proposition d’un chemin de découverte du catholicisme où les abus de toute nature sont l’occasion de réaffirmer humblement et presque avec douceur la doctrine traditionnelle. Cette affirmation humble et douce va de pair avec une écoute sincère des théologiens contemporains même s’ils s’écartent parfois de la ligne classique.
Au travers de ces lignes, c’est aussi un portrait du regretté pape qui se dessine. On est saisi par l’humilité, je l’ai dit, mais aussi par une espèce de force qui se dégage de l’ensemble et dont la nature, à n’en pas douter, a quelque chose à voir avec la foi du baptisé Joseph Ratzinger. à l’issue de la lecture, on ne peut que rendre grâce à Dieu pour le théologien qu’il fut et pour le pape qu’il a été. À l’heure où la barque de Pierre prend l’eau de toutes parts, il me semble nécessaire de lire et méditer ce profond « testament spirituel ».
Benoît XVI, Ce qu’est le christianisme. Éd. Du Rocher/Artège, 2023, 272 p., 18,90 €.