En tant que chroniqueur, il participa à toutes les émissions qui avaient trait à l’art dramatique. On pouvait l’écouter sur ce sujet à l’émission de la radio France Inter, « Le Masque et la Plume », et le lire avec délectation dans les colonnes du Canard enchaîné puis dans celles du Figaro Magazine, dans l’hebdomadaire Valeurs actuelles et dans Le Point.

Contrairement à de nombreux journalistes qui se contentent de reproduire le sujet de la pièce et d’en décrire les scènes, ce qui n’a aucun intérêt, il savait reprendre la genèse de l’œuvre, saluer la mise en abîme du metteur en scène, estimer avec justesse, en évitant l’éloge outrancier ou, a contrario, l’éreintement des acteurs à l’instar de nombre de ses confrères. Il sut aussi particulièrement mettre en exergue les qualités des ingénieurs du son et des lumières, soulignant l’art du décorateur et de la costumière.

Dans cet engagement pour le théâtre, il est devenu propriétaire de la maison d’édition L’Avant-scène théâtre et de sa revue du même nom, qui permet à tout un chacun de pouvoir avoir accès au texte original d’une pièce avec sa représentation et sa distribution. Sans préjuger de sa propre conviction, il nous a semblé que le point d’orgue sa carrière dans ce domaine fut son acquisition du Théâtre de Poche-Montparnasse à Paris.

Un grand maître de maison

Ce lieu emblématique de l’avant-garde théâtrale, inauguré en 1943, accueillit Jean Vilar et des créations de jeunes auteurs, tels Marguerite Duras, Roland Dubillard, Jacques Audiberti, Eugène Ionesco…Il fut dirigé successivement par des personnalités reconnues dont Marcel Oger, Pierre Valde, France Guy, Marcel Cuvelier, André Cellier, et Renée Delmas et son mari le comédien Étienne Bierry. En digne héritier de cette tradition, Philippe Tesson se consacra à une programmation de qualité autant dans le domaine de la création que du répertoire classique. Il faut souligner l’ambiance qui règne en ce lieu convivial, où spectateurs, comédiens et journalistes se croisent et participent à des agapes communes dans la salle d’accueil. Philippe Tesson, tel un grand maître de maison, s’arrêtait à chaque table et dialoguait avec tous.

Il fut aidé dans cette entreprise par sa talentueuse fille Stéphanie, metteuse en scène, dramaturge, et par la journaliste Daphné Tesson. On ne saurait oublier dans cette saga que Philippe Tesson est le père de l’écrivain voyageur Sylvain Tesson. Cette famille l’entoura lors de la disparition en 2014 de son épouse, Marie-Claude, présidente de l’ONG Équilibres & Populations.

Il m’est arrivé d’échanger avec Philippe Tesson dans ce cadre. Mais certains dimanches, allant chercher mon pain dans une boulangerie de la région parisienne qu’il fréquentait, je devisais avec lui. Rencontres pleines d’humour. Monsieur Philippe Tesson, est né le 1er mars 1928 à Wassigny, dans l’Aisne et mort le 1^er février 2023 à Chatou. Il va falloir que je change de boulangerie…