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Le rapport Pilecki, déporté volontaire à Auschwitz

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Le rapport Pilecki, déporté volontaire à Auschwitz

Les éditions Champ-Vallon publient un document exceptionnel : le rapport rédigé à l’attention de son état-major par l’officier polonais Witold Pilecki, déporté volontaire au camp de concentration d’Auschwitz pour y préparer une insurrection contre l’occupant. Où l’on redécouvre qu’en période de barbarie, l’âme constitue le dernier rempart de résistance.

Le 19 septembre 1940, afin de constituer un réseau de résistance dans le camp de concentration récemment ouvert à Auschwitz, le jeune officier polonais Witold Pilecki s’introduit volontairement dans une rafle de rue. Trois jours plus tard, à l’ouverture des portes du train de prisonniers, l’homme découvre « un autre monde ».

Pendant près de trois ans, en dépit de difficultés immenses, l’officier animera et développera une chaîne de renseignements et d’entraide. Son but ? Préparer une insurrection contre l’occupant allemand, à une époque où le camp était peuplé d’une partie de l’élite polonaise (officiers, prêtres, enseignants etc). Constatant que – en dépit de ses rapports envoyés au gouvernement polonais en exil à Londres – l’aide ne viendra pas de l’extérieur, il décidera de s’enfuir en avril 1943 pour rejoindre l’armée clandestine. Il participera notamment à l’insurrection de Varsovie menée par la célèbre Armia Krajova (Armée de l’intérieur) en août-septembre 1945. A la fin de la guerre, après un détour par l’Italie où il rédigera le présent rapport sur son internement volontaire (à l’attention de son état-major), il rejoindra la résistance polonaise au communisme soviétique. Il sera démasqué en 1947 et fusillé en 1948.

Le parcours et l’humilité de ce combattant relèvent davantage le récit bouleversant qu’il fera de son internement au camp de concentration d’Auschwitz. Meurtres, faim, froid extrême, dénuement, cris, brutalités gratuites, délation : tout est fait pour plier le mental des prisonniers et en faire de dociles machines de travail. Avant de s’en débarrasser.

Un document où l’on apprend que les épidémies de puces peuvent faire flancher plus facilement le moral que la présence quotidienne de la mort, que la grandeur d’âme ne s’efface jamais complètement devant l’absurdité du mal et que l’identité profonde est source de forces insoupçonnées. Un livre où l’on redécouvre que les premières chambres à gaz et les premiers fours crématoires d’Auschwitz et Birkenau ont été d’abord montés et utilisés contre des Polonais catholiques et des communistes, avant de servir au génocide des Juifs d’Europe centrale. En tout, plus d’un million de personnes ont trouvé la mort ou ont été assassinées dans le camp de concentration.

A l’époque où Witold Pilecki entrait à Auschwitz, un autre Polonais, côté soviétique, allait s’échapper d’un camp de concentration et témoigner avec une même sensibilité de son expérience : Gustaw Herling racontait Un monde à part (1955). Les deux récits semblent faire écho, celui d’une période où la barbarie n’a pas connu de limites. Et où l’âme constituait le dernier rempart de résistance.

Le rapport Pilecki, traduit et annoté par Urzsula Hyzy et Patrick Godfard, éditions Champ-Vallon (25 euros).

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