Civilisation
Vauban pour toujours
1692, le duc de Savoie franchit le col de Vars, emporte Embrun, puis Gap. Louis XIV demande à Vauban de fortifier le Queyras.
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En 2017, Pierre Mari faisait paraître un roman délicat sur l’Algérie et les pieds noirs. Trop délicat sans doute pour que le volume reçoive la publicité qu’il aurait mérité.
Il comprit sans doute que l’époque est aux emportements et qu’à moins d’exprimer une colère, rares seraient les lecteurs qui atteindraient son univers littéraire. Nous ne pouvons que lui souhaiter de donner raison à l’optimisme initial de sa lettre aux élites, En Pays Défait : « Je simplifie à grands traits mais je ne crois pas idéaliser le passé en affirmant qu’en France, les meilleurs ont toujours leur revanche ».
L’exercice est réussi. Pierre Mari évite le travers de la révérence devant une hypothétique décence commune, marronnier récurrent de la presse demi-conservatrice, et assène : « Si peuple il y a, faisons-lui l’honneur de ne pas escamoter sa responsabilité dans le marasme présent, rendons-lui la part de veulerie, d’inintelligence et de servile moutonnerie qui lui revient ». Sans en relever le terme, Pierre Mari retrouve constamment la critique que Blanc de Saint Bonnet adressa aux sociétés malades de leur incohérence. Une littérature belle et bonne peut-elle exister en des régions où les parents lettrés tressaillent devant les prouesses estudiantines en sabir managérial ? Une harmonie sociale est-elle envisageable là où le discours sur les valeurs, le plus malléable qui soit, a remplacé la transmission de l’expérience des siècles formalisée en une éthique ? L’ordre naturel des choses peut-il resurgir quand les mugissements sur le respect ont pris la place des interactions sociales où chacun aspire au maintien de la dignité du tout comme de la partie ?
Ce pays que Pierre Mari aima « sitôt la Méditerranée franchie » se défait, non seulement par la tête qu’il conspue, comme « des existences sur lesquelles nous ne pouvons rien accrocher ni projeter parce qu’elles-mêmes ne sont plus arrimées nulle-part », mais par tous ses membres condamnés à se débattre dans un pastiche universaliste ambiant qui n’est rien d’autre « qu’une évanescence pour belles âmes ».
C’est un pamphlet, mais un pamphlet fignolé que Pierre Mari nous livre. Sans doute parce qu’il n’y vise pas que des idées mais embrasse prioritairement la disparition de l’Homme, dans le tourbillon des injonctions idéologiques du temps. « L’impression dominerait, douloureuse, de n’avoir affaire qu’à des nuances ou des fragments d’hommes, parfaitement représentatifs d’une époque où l’individualisme a noyé les angles vifs de ce qu’a pu être jadis un individu. En un mot : des braises, pas de feu ».