PMA, sujet minime
Naguère, c’était la canicule. Il faisait chaud, et même très chaud. Agnès Buzyn, ministre de la Santé, était inquiète : « Je suis inquiète des concitoyens qui minimisent l’épisode, qui continuent à faire du sport comme si de rien n’était ou qui s’exposent au soleil alors que la situation risque d’être très difficile en milieu de semaine dans beaucoup de villes de France », avait-elle déclaré à l’occasion d’un point presse au ministère de la Santé. Sinon, elle envisage tranquillement de bouleverser toutes les règles de la filiation avec une loi dont elle tient à souligner que « ce n’est pas une loi de combat mais un texte élaboré après une large consultation » – dont l’État a bafoué les règles qu’il avait lui-même fixées, comme nous le disions dans notre dernier numéro. Mais c’est un détail de peu de poids face à la canicule. Voilà un épisode qu’il ne s’agit pas de minimiser ; alors qu’on peut minimiser le fait que les Français n’attendent pas du tout qu’on leur colle la PMA, puis la GPA, faisant disparaitre l’homme, transformant l’enfant en droit, c’est-à-dire en objet, et asservissant la femme aux désirs des riches ; que connaît bien Agnès Buzyn, ministre millionnaire ; qui ne minimise pas l’intérêt qu’elle porte aux désirs des riches. La canicule est passée, BFM a dû changer de sujet, la PMA va passer, BFM n’en fera sans doute pas un sujet.
ADP, sujet vide
À moins que BFM ne dise que manifester contre la PMA, et Buzyn, c’est un déni de démocratie. Car LaREM et ses soutiens savent ce que c’est que la démocratie : c’est le parti du président. Gérard Larcher, qui est un opposant comme Macron les aime, sait par exemple que « le RIP est un détournement de démocratie représentative ». Parce qu’il y avait un trou dans la Constitution. Gérard est un spécialiste des trous. En ce moment, il explore le gouffre où a été englouti LR mais il compte bien en sortir pour défendre la vraie démocratie représentative. Celle où les députés du parti majoritaire se moquent en définitive de l’avis des sénateurs mais où les sénateurs se sentent importants parce qu’ils ont pu donner leur avis. C’est ça qui est important, pour Gérard : donner son avis ; car ça lui donne de l’importance. ADP, il le sait, c’est plié, mais il a pu dire ce qu’il en pensait, alors c’est quoi ces gens qui veulent revenir sur l’avis des parlementaires ? Où se croient-ils ? Heureusement, le RIP décolle lentement et aucun élu LR n’en parle. On a été à deux doigts d’avoir une vraie opposition, c’était chaud. Mais on est en France, jeunes freluquets ! Quand les hommes sages, comme Gérard Larcher, qui habite Rambouillet, sous-préfecture des Yvelines, quand des anciens ministres délégués à l’Emploi, au Travail et à l’Insertion professionnelle des jeunes, comme Gérard Larcher, ont donné leur avis, les Français se taisent. Non mais. Encore un peu et on expliquerait que le Sénat ne sert à rien ; non mais c’est vrai, quoi.
La violence, sujet variable
Castaner a moins de certitudes que Gérard. En fait, il est nuancé. C’est un délicat. On croyait qu’il croyait que les policiers pouvaient taper impunément sur tout ce qui bouge, mais c’est uniquement quand c’est jaune. Quand c’est jaune, on peut taper, arroser, gazer, tirer et éborgner, ça le fait. Quand c’est pas jaune, on peut pas. À Nantes, la police a jeté quatorze personnes à la Loire, le 24 juin. Ce n’était pas encore la canicule, il faisait déjà chaud, c’était festif, ça rappelait les noyades de Carrier, qui appelait la Loire « baignoire nationale », il y avait un côté pédagogique, donc, et en plus on les a repêchées – comme avec Carrier, mais vivantes ; festif, mais mesuré. Et puis ces gens avaient bu et donc, comme le dit admirablement le préfet de Loire-Altlantique, « les forces de l’ordre interviennent toujours de manière proportionnée. Mais face à des individus avinés, qui ont probablement pris de la drogue, il est difficile d’intervenir de façon rationnelle. » C’est le bon sens même. Quand le manifestant boit, le CRS s’égare. Bref, Castaner a pris un coup de chaud et a saisi l’IGPN. C’est comme ça qu’on sait qu’il est sensible aux nuances, et en tout cas à la température.
En résumé, nous aurions pu avoir un pouvoir qui ne transforme pas sa police en milice du parti, des parlementaires qui osent se dresser véritablement contre un pouvoir affranchi de toute mesure, et une France qui respecte la dignité des personnes humaines. Nous aurions été dépaysés. On a eu chaud.
Par Philippe Mesnard